D’Archimède à Tuco Benedicto Pacifico Juan Maria Ramirez, la baignoire a toujours été un haut lieu de philosophie percutante. À l’eurêka du premier fait écho le “Quand on tire, on raconte pas sa vie.” du second. Entre les deux, vingt-et-un siècles nous contemplent…
Quand on écrit de la littérature érotique, on raconte pas sa vie non plus ni grand-chose d’ailleurs quand on voit à quel point la notion de scénario peut se révéler optionnelle dans certaines œuvres.
Sans famille / Aura l’orpheline
Roberto Baldazzini
Dynamite / Delcourt
Sans famille chez Dynamite, orpheline chez Delcourt, à défaut de s’accorder sur le titre, les éditeurs ont au moins compris qu’Aura était seule. C’est d’ailleurs tout ce qu’on peut capter de cet album au scénar pas clair. Comme Aura, l’histoire sait à peine d’où elle vient et n’a aucune idée d’où elle va. Baldazzini jette en vrac des idées et des bouts de récit épars avec pour résultat une BD nébuleuse dans ce qu’elle cherche à raconter.
SDF, Aura trouve refuge auprès de travailleurs du sexe gays et transgenres. Pourquoi ? Parce que les personnes transgenres sont une des marottes de Baldazzini. Sinon cette spécificité des personnages, qui pourrait nourrir le récit, n’est pas exploitée et Aura pourrait aussi bien se trouver parmi des hétéros, des lesbiennes, de chastes nonnes ou dans un club de bridge plein de nonagénaires, ce serait pareil. Aura, peut-être elle est enceinte, parce qu’elle en manifeste un certain nombre de symptômes (vertiges, nausées), peut-être pas, parce que vu le final où elle libère un flot de diarrhée dans le caniveau, son état de santé pourrait tout aussi bien s’expliquer par une gastro. Quant aux thèmes psychologiques et sociaux (solitude, mal-être, famille biologique ou d’adoption, fétichisme, violences sexuelles, travailleurs et travailleuses du sexe) censés constituer le cœur de l’ouvrage, ils ne sont qu’évoqués vite fait, à peine esquissés et jamais creusés.
Le rêve de Cécile
Erich von Götha
Dynamite
Le rêve de Cécile ou l’art de ne pas se casser la tête avec des détails inutiles dans un récit comme des dialogues ou un scénario.
Cécile rêve, astuce pour caser tout et n’importe quoi comme scènes sans souci de leur enchaînement, de la cohérence, ni de quoi que ce soit. Il n’y a même pas une histoire prétexte, exception faite des quatre dernières cases qui essayent tant bien que mal de justifier le bousin – tâche dans laquelle elles échouent pire que le Titanic contre son iceberg préféré.
Pis tant qu’à pas raconter d’histoire, pourquoi s’embêter avec des bulles et du texte ? Donc Cécile se fait prendre par tous les orifices pendant plus de quarante pages par des nobles en perruque poudrée, des Indiens, des types en costard, des punks, à la campagne, dans une voiture, en soirée mondaine, dans les chiottes…
Tout ça pour nous révéler à la fin… attention coup de théâtre… que c’est un rêve qu’elle fait toutes les nuits. Merci du scoop qui était annoncé dès le titre.
Tania et Bertille
W. G. Colber
Tania et Bertille sont infirmières et amantes. Très professionnelles à leur façon, elles couchent aussi bien avec les patients qu’avec les médecins du quartier. Puis arrivent comme un cheveu sur la soupe un gangster blessé à soigner, une fusillade, un resto pour se remettre des émotions fortes, l’évocation d’un vieux souvenir de jeunesse. Pas une once de liant, les scènes sortent de nulle part dans la plus parfaite incohérence. Le tout servi par un dessin plutôt moyen.
La vie de Flora
Bruno Coq
Dynamite
Élevée à la dure dans un pensionnat, Flora est aujourd’hui une femme libérée. Dans ce genre de littérature, on sait ce que ça signifie : sexe à gogo. Scénario pas magique (y en a-t-il un ?), style de dessin auquel je n’accroche pas (la couv’, j’adore, mais à l’intérieur c’est beaucoup moins précis, réaliste et soigné et beaucoup plus tracé à grands traits), couleurs immondes.
La mauvaise élève
Ardem
Dynamite
Au lycée, Mathilde à de mauvaises notes parce qu’elle n’en branle pas une. En dehors, ce serait plutôt l’inverse. Le scénar, sans queue ni tête, n’est qu’un prétexte à enfiler les scènes de cul dans le plus parfait foutoir. Le dessin n’est pas terrible du tout. L’ensemble tient moins de la BD finie que du brouillon.
Lola Star
NevraX
Tabou
Lola Star, trois tomes, triple dose de douleur pour bibi…
Tome 1… Un univers de SF avec des aliens et des robots, OK. Avoir voulu raconter une histoire autour des scènes de cul, bonne idée… pas trop concrétisée vu les maladresses de narration. Les couleurs très vives, je ne suis pas fan en général, mais là, pour une fois, je trouve qu’elles passent bien dans l’ambiance générale. Ce choix esthétique est torpillé par l’amateurisme du reste, entre un dessin très moyen au trait qui manque d’assurance, la plupart des visages ratés et le choix d’une police de caractères qui fait vraiment cheap.
Tome 2… Le bien-nommé Mutations, puisque le style a changé du tout au tout. Nouvelle police de caractères, plus pro (la classique qui est utilisée dans 99% des BD). Les couleurs sont beaucoup moins vives pour n’avoir presque plus d’éclat, soit un résultat moins agressif mais trop poussé dans l’autre sens, quasi terne. Le dessin est un de ces graphismes quelconques qui pullulent chez les trois quarts des dessinateurs en numérique, sans patte particulière, sans relief, pas très détaillé, vide et moche, avec des visages catastrophiques. Le plan final s’autorise à croiser les effluves en usant d’un logiciel 3D pour un rendu dont la texture diffère du reste.
Tome 3… Implosions, c’est le titre du volume. Il correspond aussi à l’état de mes yeux à ce stade de la lecture. Les mêmes qualités que le tome 2 : aucune. Les mêmes défauts, avec en prime une narration qui ne sait plus où elle va, traîne en longueur et raconte n’importe quoi.
Amateurs et amatrices de BD olé-olé, rendez-vous dans les autres zones érogènes du blog…
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