L’hiver arrive, il est temps de sortir de quoi se chauffer ! Va-t-on attraper un coup de chaleur avec la moisson du jour ou au contraire continuer à se peler les miches ?…
Chiara Rosenberg, la double vie d’une dominatrice
Roberto Baldazzini (dessin) & Celestino Pes (scénario)
Delcourt / Dynamite
Deux éditions de la vie de Chiara Rosenberg, l’une en couleurs chez Delcourt, l’autre en noir et blanc chez Dynamite. J’ai trouvé la version Delcourt bien meilleure. Le trait y est beaucoup plus fin et précis, la colorisation dynamise le graphisme et en prime on a droit à une petite histoire bonus sur la rencontre entre Chiara et son futur mari.
Soumise aux jeux de domination de son mari, Chiara a elle-même des élans de dominatrice sur la personne d’un photographe qui devient son amant. On va donc suivre sa double vie, mi-soumise mi-dominatrice, sans que jamais ce grand écart dichotomique ne soit expliqué par une raison valable, ce qui donne un personnage joliment dessiné mais fade en termes de psychologie. L’héroine est d’autant moins accrocheuse que son comportement tient parfois moins de la domination que du seul plaisir malsain de se montrer exécrable.
L’histoire se contente d’être une histoire, une scène après l’autre, sans rien creuser ni sur le thème de la domination-soumission, ni sur cette forme d’amour particulière qui unit Chiara à son mari. Eh oui, ils s’aiment, mais c’est surtout parce que c’est dans le scénario, vu qu’on ne voit pas trop ce qui les unit. Et l’amour a ses raisons que la raison ignore, merci, mais ça ira avec les non-arguments.
Au final, cet album offre une lecture sympa qui n’ira pas plus loin que ça et ne laissera pas un souvenir impérissable.
Gigolo
Enrique Sánchez Abulí & Jose Maria Saurí
Dynamite
Après Un Américain à Paris, Une Américaine à Paris, voici deux Américaines à Rome et c’est tout nase.
Déjà, le dessin, faut aimer ce style proche du croquis voire de l’esquisse. Ce n’est pas mon cas. J’ai eu moins l’impression d’avoir sous les yeux un produit fini qu’un brouillon.
Ensuite, l’histoire, ben elle traîne un peu en longueur avant la rencontre entre les deux donzelles et le fameux amant italien qui doit leur retourner la tête.
Enfin, l’état d’esprit. Cette BD ne repose que sur une approche de bourrin énoncée dès la préface : “elles succombent au charme latin, dont le principe de base est fort simple : deux baffes et maitenant tu suces”, fin de citation. Tout du long, les deux meufs disent non. Et tout du long, les mecs les obligent en usant de la force, à grands coups de tartes dans la tronche. Et bien sûr (sic), à la fin, elles trouvent que c’était bien quand même. Ben voyons… Sans déconner, y avait pas moyen de raconter la même histoire en mode consentant, youpi c’est la fête, on est là pour visiter Rome et se faire plaisir dans la foulée ? Parce que RIEN dans le bouquin ne vient étayer ce choix du sexe forcé, aucune dénonciation, aucune réflexion, aucune thématique creusée de la violence. Les auteurs se complaisent juste là-dedans en mode “c’est comme ça que les choses fonctionnent et c’est très bien comme ça”. Euh… non ?
C’est moche, c’est mou, c’est puant : c’est Gigolo.
Android City
James LeMay
Dynamite
Histoire courte d’une vingtaine de pages, Android City aurait gagné à un traitement plus long au format traditionnel de quarante et quelques planches. Après, LeMay n’étant pas un bon scénariste, peut-être pas un mal qu’il ait fait court plutôt qu’une longue intrigue bancale mal développée.
L’ambiance mélange science-fiction avec ses androïdes et ses robots au courant noir des années 40-50 avec sa détective privée et ses femmes fatales. Un peu comme le faisait Blade Runner en beaucoup mieux. Ici, l’ambiance reste atone, le cadre futuriste générique sans patte particulière, la faute à un dessin à l’économie, sans travail sur les décors, avec beaucoup de vide à l’arrière-plan des personnages. Dans l’ensemble, le graphisme n’est pas fou.
À la fois très inspiré (par d’autres œuvres) et pas beaucoup (puisque tout est piqué ailleurs), LeMay emprunte beaucoup : outre le noir et Blade Runner, sont aussi de la partie Terminator, Judge Dredd, Star Trek (le character design de l’héroïne est pompé du personnage de Seven of Nine dans Star Trek: Voyager, où il était interprété par Jeri Ryan).
L’histoire s’achève sur une interrogation à la Philip K. Dick à propos de l’identité des humains et des robots. C’est justement le point qu’il aurait été intéressant de développer au cours de l’intrigue. On restera sur ce goût d’inachevé…
Saxkal Ashram
Saxkal
Dynamite
L’album se veut un hommage à Robert Crumb, Fred, Moebius, et de ce point de vue, c’est une réussite… qui s’adresse à d’autres lecteurs que moi.
Les dessinateurs concernés sont bons, c’est pas le problème, juste j’accroche pas, ni à leur style graphique ni à leur mode narratif.
Tous les trucs de gourou, tantrisme et mystique sexuelle ne me parlent pas. Je suis aussi hermétique à ce thème qu’une boîte Tupperware.
Un album bien fait mais dont je ne suis pas le public cible.
GladyS & Monique
Juan José Ryp
Tabou
Particularité de cet album, les personnages n’ont à peu près aucune ligne de dialogue, les seuls mots articulés qu’ils prononcent sont les noms des protagonistes auxquels ils s’adressent. Le reste du temps, quand ils doivent s’exprimer, leur bulle affiche un petit dessin censé représenter ce qu’ils racontent. Un bon moyen pour exporter la BD en économisant des frais de traduction, sauf qu’en termes narratifs, l’astuce ne fonctionne pas. Cette communication aux airs de rébus s’inscrit dans une ambiance SM – donc un univers plutôt strict par définition – et dans un contexte élitiste, croulant sous le pognon, avec l’ambition d’être classe. Je crois pas que des gens qui parlent en émoticones – puisque c’est à ça que ça revient – soit le choix le plus pertinent vu le cadre choisi.
À travers huit historiettes à chute, on suit les aventures saphiques et mutiques de Gladys et Monique, entre domination, soumission et fétichisme. Le dessin est excellent, très dynamique, avec une inspiration graphique et thématique DC/Marvel, ce qui fait d’autant plus regretter le remplacement des rares dialogues par des rébus qui manquent de punch.
The cruise
Erich von Götha
Dynamite
D’abord publié en anglais, The cruise a été traduit en français. Sauf le titre. Pourquoi ? On ne sait pas. C’est pas comme s’il s’agissait d’un terme anglo-saxon sans équivalent en français. Au hasard, j’aurais tenté La croisière. Peut-être que l’éditeur pensait que conserver le titre original sonnerait exotique… Perdu, moi, ça me donne une impression de taf fait à moitié.
À l’origine, il s’agissait de courts épisodes publiés en revue spécialisée, chacun comportant une scène de cul qui faisait office de scénario. Les voici compilés, suite de saynètes qui voit Margaret, Bill, Trevor et Janet, quatre personnages mal dessinés, embarquer sur un bateau moche pour partir en croisière et partouzer non-stop sur presque cinquante pages au graphisme de plus en plus imprécis au fur et à mesure qu’on avance dans la BD. Leur non-histoire se conclut sur des planches très vilaines qui piquent les yeux.
La seule qualité de cet album est sa cohérence : du début à la fin, il ne présente aucun intérêt narratif ou artistique.
Amateurs et amatrices de BD olé-olé, rendez-vous dans les autres zones érogènes du blog…
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– l’Histoire, avec un grand H et un petit cul
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