Je profite des frimas hivernaux pour bouquiner sous la couette la tonne de BD qui traîne dans un carton depuis cinq ou six ans.
En langage BCBG d’éditeur, on appelle ces albums des “bandes dessinées érotiques” pour que ça sonne classe. Ne nous voilons pas la face : quand les personnages passent une quarantaine de pages à se faire mettre le cul en vrac, à bouffer du chibre au kilomètre et à prendre des torrents de foutre sur la poire, c’est de la pornographie, du X gras et qui tache. Des livres qui se lisent d’une main, comme on dit dans le métier (et de l’autre tu tiens le bouquin, pendant que tu tournes les pages avec les dents).
En route pour une virée revigorante qui va mettre de la chaleur dans les chaumières et du soleil dans les caleçons !
Train de Nuit (2 tomes)
Hugdebert
Les trains sont une des marottes d’Hugdebert (Guillaume Berteloot), dont la biblio regorge de titres ferroviaires.
C’est l’histoire de Carole qui prend le train, plusieurs trains en fait. Chaque fois elle se tape la ou les personnes dans le même compartiment qu’elle. Un homme, une femme, un couple. Une fois qu’on a compris l’idée du fantasme ferroviaire, du coup furtif avec un inconnu, ça devient redondant dès la troisième scène et ça dure tout un album, puis un second qui raconte la même chose.
Pas du tout accroché au dessin que j’ai trouvé mal assuré, presque amateur, avec des couleurs baveuses en prime.
Bref, rien ne m’a plu, sur ce coup-là, je suis resté sur le quai avec mes valoches.
Le secret de tante Pauline (2 tomes)
Hugdebert
Même dessinateur que Train de Nuit mais bien meilleure pioche, les aventures olé-olé de tata Pauline !
Fin XIXe siècle, Pauline vit avec sa servante et son jardinier dans un manoir bourgeois où elle reçoit ses amies, ses nièces, un artiste. Chaque combinaison des personnages que je viens de citer donne lieu à une scène de sexe classique, sans pratiques extrêmes. Et voilà. Simple et efficace.
Le dessin en noir et blanc, réaliste et agréable, rend bien l’ambiance de l’époque, toute de jupons, corsets, crinoline et bottines.
Un seul tome aurait suffi, le second n’apporte rien de neuf par rapport au précédent, le tout donne un doublé sympathique.
Le Voyeur
Chris
Glénat / Le Marquis
Sans doute un de mes albums préférés du père Chris (Xavier Musquera).
Simon, voyeur, joue à Fenêtre sur cour et espionne la blonde sexy qui habite l’immeuble d’en face. Il prend le contrôle sur elle grâce à une paire de jumelles, et un téléphone (et surtout grâce à la magie du scénario qui ne s’embarrasse pas de crédibilité). Soit une trame classique, qui s’écarte assez vite de son titre pour deux raisons, une bonne et une mauvaise. La bonne, c’est que l’album aurait tout aussi bien pu s’intituler L’exhibitionniste, vu les penchants de l’accorte voisine révélés par les manipulations du voyeur. Un peu hors sujet, mais ma foi on ne crache pas dessus, puisque l’astuce permet de montrer la donzelle sous toutes les coutures et dans toutes sortes de situations. La mauvaise, c’est que plusieurs scènes sont incohérentes à se passer dans des lieux extérieurs à l’immeuble cible de Simon, donc hors de sa vue et de sa présence.
La raison pour laquelle j’adore cette BD, c’est que pour une fois la victime ne se contente d’être obéissante, soumise, contrainte, mais qu’elle va se rebeller et rendre la monnaie de sa pièce à son tortionnaire. Avec en prime un twist final bien vu.
La Thèse
Le dressage de Jane (2 volumes)
Chris
La Thèse est un album que j’aime beaucoup du père Chris, souvent considéré comme son meilleur.
Jenny, étudiante sexologue, prépare la fameuse thèse qui donne son titre à l’album. Accusant de grosses lacunes en BDSM, elle entreprend un stage pratique pour parfaire ses connaissances du sujet.
Si j’adore cette BD, c’est parce que pour une fois, l’héroïne est consentante et pas comme trop souvent kidnappée, contrainte, forcée. On se situe donc ici dans des rapports de domination/soumission volontaires et un état d’esprit de découverte et d’exploration, pas d’humiliation glauque et malsaine d’une victime par un bourreau.
Les premiers pas de Jenny sont bien rendus à travers des scènes qui présentent les bases du SM, avec imagerie et accessoires traditionnels (ligotage, cuissardes, bâillons, cravache, godes…), sans mettre la charrue avant les bœufs à s’aventurer direct dans des pratiques extrêmes réservées aux détenteurs d’un bac+12 en sado-maso. Hard sans être hardcore.
Le dressage de Jane et sa suite-préquelle Les souffrances de Jane constituent une version longue et revisitée de La Thèse. Jenny s’appelle Jane, n’est pas étudiante mais soubrette et passe du brun au blond. On retrouve ses deux profs sous les traits de “gentlemen” membres d’un club privé. À signaler l’arrivée d’un personnage supplémentaire en la personne d’une dominatrice obèse. Beaucoup de dialogues sont les mêmes que dans La Thèse au mot près. Même chose pour la mise en scène qui reprend des planches redessinées à l’identique avec pour seuls changements le visage des personnages et le style du trait. Le sexe est ici un poil plus hard que dans l’opus thésard, avec davantage de contraintes, de fouet et de cuir, plus une touche lesbienne en bonus.
Bea flic de choc
Torrid nights
Chris
Commissaire de police, Béatrice Charbonnier enquête sur des assassinats de jeunes femmes et n’hésite pas à payer de sa personne pour découvrir le coupable.
Cet album de porno polar est à l’image du pitch : simple, sobre, efficace, explicite. Le tout pour un résultat correct dans le dessin comme dans l’histoire. Seul défaut de cette bande dessinée, elle ne se démarque en rien, chaque élément (personnages, intrigue, scènes de sexe, graphisme, etc.) étant “pas mal”, “honnête”, “sympa” mais sans transcendance. Une bonne lecture sur le moment mais dont il ne restera pas beaucoup de souvenirs d’ici quelques mois.
À noter qu’on trouve ici et là sur le Net un tome 2 qui n’en est pas un, Torrid Nights, dans la même veine policière avec cette fois une histoire d’enlèvement beaucoup moins convaincante parce que trop brouillonne. Et sans Bea.
Three of a kind
Atilio Gambedotti & Ivan Guevara
Eurotica
Il y a un scénariste – Guevara – et c’est plutôt rigolo. Cet album n’est jamais qu’un clone des 4 amies du même Gambedotti, sauf qu’au lieu d’un quatuor de meufs, on a un trio de mecs (un séducteur invétéré, un grand romantique et le dernier qui n’est ni l’un ni l’autre et un peu des deux à la fois, parce que le personnage est mal écrit). Les gus se racontent leurs conquêtes, et là je viens en six mots de raconter la totalité du scénario. Tour à tour, ils vont se lancer dans le récit de leurs exploits, soit une suite de saynètes de cul enfilées l’une après l’autre, et faudrait que le lecteur y voie une histoire.
Le style de Gambedotti peine à marier ses influences, un peu naïf, un peu réaliste, un peu comics, un peu manga, un peu cartoon, et surtout très numérique et criard dans son rendu.
Ce titre se lit et s’oublie dans la foulée.
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