Aux USA, deux magazines étaient dédiés au jeu de rôle Donjons & Dragons : Dragon (1976-2013), plutôt orienté aides de jeu, et Dungeon (1986-2013), plutôt orienté scénarios prêts à l’emploi.
En France, Hexagonal, maison d’édition de JdR (Bushido, JRTM, Rolemaster…) lance une VF en 1991, Dragon Magazine, par le biais d’un numéro zéro distribué en boutique spécialisée. Suivront 45 numéros jusqu’en 1998, date à laquelle le rachat mouvementé de TSR par Wizards of the Coast met fin à l’aventure.
Retour sur une exception culturelle française qui a su trouver sa propre voie par rapport à son modèle original…
Dragon Magazine, l’encyclopédie des mondes imaginaires fut culte en son temps. À sa sortie, il y a peu de concurrents directs en presse rôliste généraliste. Graal et Dragon Radieux ont rendu l’âme en 1990, Tatou et Plasma s’adressent à un lectorat de niche lié aux produits de leurs éditeurs respectifs (Oriflam pour le premier et Siroz pour le second), Chroniques d’Outre Monde, après une période faste et furieuse, amorce son déclin suite à un changement brutal d’équipe. Ne reste que Casus Belli à tenir le haut du pavé.
Dragon a les mains libres et l’intelligence de ne pas piétiner les plates-bandes de Casus. À l’époque, je lisais les deux revues : elles avaient le grand mérite d’aborder leur sujet en proposant des angles et contenus différents, ce qui les rendaient plus complémentaires que concurrentes.
Casus parlait jeux de rôle, wargames, jeux de plateau, Dragon était focalisé JdR (avec une forte dominante Advanced Dungeons & Dragons – AD&D, de son petit nom – mais pas que, le contenu était bien plus varié en titres que son homologue américain) et faisait beaucoup de ponts avec la littérature et le cinéma. Casus était connu pour son encart central de scénarios, Dragon pour son cahier technique d’aides de jeu. Casus accordait une large place à l’actu des sorties, Dragon versait dans le dossier thématique. Bref, chacun ses spécificités et les deux fonctionnaient bien ensemble. Je faisais souvent jouer les scénars de Casus en intégrant des éléments de Dragon piochés dans les aides de jeu et les dossiers.
À quoi ça ressemblait grosso modo un numéro de Dragon ?
– Les rubriques lambda classiques (édito, courrier des lecteurs, commande d’anciens numéros).
– Banque des dragons permettant de miser une monnaie fictive pour remporter des lots aux enchères (JdR, BD, figurines…).
– Brèves d’actu de sorties ciné, vidéo, BD, bouquins, jeux VF, jeux VO.
– Une nouvelle et de la BD.
– Des conseils de peinture de figurines et création de diorama.
– Trois dossiers composés d’articles traduits repiqués au grand frère américain et d’articles originaux en VF, sur trois thèmes sans rapport, ce qui permettait toujours de trouver son bonheur à défaut d’une cohérence d’ensemble.
– Le cahier technique en noir et blanc d’aides de jeu complémentaires aux dossiers thématiques.
Dragon, c’était surtout le tiercé de thèmes abordés qui valait le coup (et dans une moindre mesure les aides de jeu qui fournissaient surtout une base ténue à développer soi-même).
Si beaucoup de ces dossiers peuvent paraître aujourd’hui légers et trop dans le survol, à l’époque c’était quelque chose, parce qu’on n’avait pas Internet et la mine d’infos qui va avec. En prime, les renvois transmédia étaient légion, à croiser la base du jeu de rôle avec des tonnes de références pour prolonger le sujet soi-même à la maison, via la littérature, l’histoire, le cinéma, le jeu vidéo. Je me suis retrouvé par cet intermédiaire à lire je ne sais combien de bouquins et voir autant de films.
Je lisais Casus pour les avis critiques sur certains jeux/suppléments, les scénars, les wargames en encart et les hors séries restés dans les annales (Simulacres, Laelith…). Je lisais Dragon pour voyager entre les mondes imaginaires : cette revue a beaucoup pesé dans la constitution de mon bagage en fantasy et SF avec des découvertes à la pelle. Aujourd’hui encore, je replonge le nez dedans assez souvent pour naviguer d’un univers l’autre…
C’est parti pour un tour d’horizon de ma collection ! Si vous voulez le zapper pour sauter tout de suite à la conclusion, où il sera question d’une certaine vision de l’imaginaire et de l’héritage de cette époque mythique, cliquez sur le téléporteur !
Le mythique n°0 (juillet-août 1991) doit son statut culte à sa rareté plus qu’à son contenu. À l’époque, il avait été distribué en boutiques spécialisées, donc hors quelques grandes villes (Paris, Lille, Lyon, Bordeaux…), tu pouvais t’asseoir dessus quand tu habitais comme moi un patelin paumé. ‘Fin bref, à l’époque (bis), on pouvait encore facilement le commander auprès de l’éditeur, mettre la main dessus n’avait rien d’une mission impossible.
Au menu des dossiers : dragons (thème incontournable vu le nom du magazine), cyborgs (Asimov et Blade Runner, posés là comme des cheveux sur la soupe) et elfes noirs (le plus intéressant des trois). Plusieurs rubriques sont vides de contenu, présentes pour expliquer ce qu’elles deviendront par la suite. Le cahier d’aides de jeu n’est pas bien folichon, la faute à un lancement coincé entre AD&D1 et la sortie imminente de la seconde édition en VF.
C’est donc clairement un numéro de mise en place et de rodage, très dépendant de son grand frère américain, avec ses marques à trouver, ses ajustements à apporter pour mieux correspondre au public français. En tout cas, ce numéro zéro se montre riche de promesses, qui seront tenues avec le temps.
Le n°1 (septembre-octobre 1991) souffre du défaut de jeunesse de vouloir tout raconter sur tout… sauf que la place est limitée. Sur cinq dossiers, deux sont développés (les dragons, encore, et Arkham), deux nous laissent sur notre faim (les spécificités des batailles rangées de fantasy et les grands méchants de l’imaginaire), le dernier est anecdotique (Full Metal Planet). Le tir sera par la suite corrigé, le magazine se bornera le plus souvent à traiter trois thèmes développés plutôt que partir dans tous les sens pour ne pas dire grand-chose à l’arrivée.
Le cahier technique vaut surtout pour l’anti-paladin, si vous cherchez un super vilain récurrent pour vos aventures de fantasy.
La nouvelle Les monstres de Robert Sheckley est un classique sur le thème “qui est humain ? qui est un monstre ?” et paraît encore plus barrée aujourd’hui qu’à l’époque de sa rédaction (1953) ou même de sa publication dans Dragon.
Au menu de ce n°2 (novembre-décembre 1991), l’univers de Battletech (jeu de plateau avec des robots de combat à la Goldorak), l’épée Stormbringer issue du Cycle d’Elric de Michael Moorcock et la bande dessinée Elfquest (BD pleine d’elfes et de loups déclinée en jdr et jeu de plateau). Le hic, Elfquest est un sujet de niche qu’on aurait plutôt vu traité en format court de simple présentation. Battletech aurait gagné à déborder son sujet et aborder d’autres titres plein de robots géants pilotés au lieu de se concentrer sur un seul jeu. À côté de ça, l’article sur la Vouivre est expédié en une page, un article traduit en plus, alors qu’il y avait matière en VF vu l’origine de la légende et son traitement par Marcel Aymé dans le roman du même nom.
Le n°3 (janvier-février 1992), si je me souviens bien, c’est le premier que j’avais acheté en presse. Emblématique de l’éclectisme des dossiers, puisqu’on croise ici des xénomorphes (Alien 3 sortait cette année-là) et des hobbits, avec deux gros dossiers très complets et bien fichus. Le dossier sur la réalité virtuelle telle qu’on l’imaginait il y a trente ans vaut surtout pour l’aspect historique, comme une espèce de SF rétro (pour mémoire, c’est cette année-là que les premières connexions à un web limité ont été ouvertes en France et il faudra attendre 1994 pour voir apparaître le premier fournisseur d’accès grand public).
Chouette nouvelle de William B. Crump, La ballade de Droone, avec son héros nain… qui fait le nain (creuse, se bat à la hache, boit de la bière).
Au programme du n°4 (mars-avril 1992), un gros dossier sur les vampires, plein de passerelles transmédia vers le cinéma, le jeu vidéo, la littérature, le jeu de rôle. Vampire : la mascarade, best-seller du jdr, venait de sortir, le Dracula de Coppola et Entretien avec un vampire étaient annoncés sur les écrans pour bientôt. La période marquait, pour les buveurs de sang, les débuts d’un bref âge d’or d’une quinzaine d’années, avant que Twilight et la bit lit ne les tournent en ridicule.
Second volet marquant, une récap’ “à la croisée des mondes” des différents univers de Donjons & Dragons (Greyhawk, Dark Sun, Ravenloft, Spelljammer…), pour se concentrer ensuite sur le plus développé d’entre eux, les Royaumes Oubliés, dont l’exposé est complété par un portrait d’Elminster, le Gandalf local. J’avais la boîte de base en VO, c’était un bon cadre, riche, touffu… et hyper classique : orcs, nains, elfes, nécromanciens, épées magiques, de la fantasy de base idéale pour faire démarrer des débutants avant de les amener vers des cadres plus exotiques.
Le dossier sur la BD Valérian est quant à lui le maillon faible et ne présente pas grand intérêt.
Un de mes numéros préférés que ce n°5 (mai-juin 1992). Pas exempt de faiblesses parce que monté à la ouanegaine avec un peu tout et n’importe quoi (Les Fourmis de Bernard Werber côtoient des tests de flippers, un récit d’expédition dans l’Antarctique, des extraits random du Guinness Book, un article sur la triche).
Mais il y a un dossier sur les orques. Je dirais même ZE dossier. Peuple présent dans tous les univers de fantasy mais pas que – on les retrouve dans la réalité contemporaine alternative de Shadowrun et dans le futur avec Warhammer 40K –, les orques sont partout et nulle part. Monstres lambda, ennemis génériques, chair à canon pour PJ, tout ça ne va pas bien loin. On trouve ici développés leur mode de vie, leurs us et coutumes, avec pour axe principal l’univers AD&D (panthéon, langue, classes de persos semi-orques), quelques renvois à Tolkien (liens avec Sauron), Runequest, Rêve de Dragon, Warhammer version heroic fantasy, Shadowrun (leur place dans une société de cyberfantasy), plus un topo complet sur les orks de Warhammer 40K. Autant dire un panorama fourni sur le sujet, avec en prime l’originalité, loin des sujets classiques sur les elfes, les nains ou les magiciens.
“Rêve et cauchemar” annonce la couv’ du n°6 (juillet-août 1992). Le contenu est à la hauteur, avec du rêve (dossier sur les licornes) et du cauchemar (Lovecraft avec un extrait de Contre le monde, contre la vie de Michel Houellebecq et un faux livre maudit, histoire de changer de l’éternel Necronomicon).
Vient s’ajouter une présentation de l’univers de Warhammer 40000, ainsi qu’une conversion des règles de Warhammer version fantasy pour basculer au 41e siècle. Pas rien à l’époque, où il était question d’un jdr WH40K depuis 1987… lequel ne verra le jour qu’en 2008.
En bonus, le drider, un hybride de drow et d’araignée géante, qu’on aurait plutôt vu dans le n°0 sur les elfes noirs.
On entre dans ce n°7 (septembre-octobre 1992) à ses risques et périls… si on parvient à montrer patte blanche en surmontant énigmes retorses et portes piégées. D’autres portes, dimensionnelles elles, ouvrent vers des horizons littéraires et rôlistes. De mémoire, il me semble que c’est par le biais de l’article sur les portes entre les mondes que je m’étais retrouvé à lire la Saga des Hommes-Dieux de Philip José Farmer.
Au cœur de ce numéro, Michael Moorcock tient la place d’honneur avec une interview, un panorama des séries de romans et nouvelles autour du Champion éternel et une nouvelle autoparodique (La pierre d’achoppement).
N°8 (novembre-décembre 1992), le bien nommé “Soleil sombre”, avec un dossier sur Dark Sun, un univers original et intéressant pour AD&D, plein de sable à la Arrakis et loin des stéréotypes tolkieniens.
Suit une présentation de la BD L’Épée de Cristal, dont sont issues Lorette & Harpye, les deux sorcières qui occupent les pages BD de Dragon. Bon ben sans plus.
Le dossier sur les liches et dracoliches a le mérite de s’arrêter sur deux créatures mortes-vivantes plus exotiques que les éternels vampires et zombies.
Le dossier sur les Vikings annoncé en fin du n°7 a été mangé par Jörmungand (en vrai, repoussé au n°10), il n’en reste que la nouvelle de Lois Tilton, Thor va à la pêche (que perso j’aurais décalé avec le reste du dossier viking, là elle sort de nulle part, à moins de capillotracter un lien avec l’article sur les anguilles géantes de Star Wars, lui aussi sorti de nulle part).
Un numéro pas fou, on sent que le contenu prévu a été chamboulé à la dernière minute avant la publication et remplacé par ce qui tombait sous la main des rédacteurs.
Un n°9 (janvier-février 1993) qu’il est pas mauvais mais portant sur des sujets qui ne me passionnent pas plus que ça. Sans doute le mieux conservé de ma collec’, ceci explique cela, faute de l’avoir relu à outrance comme d’autres numéros.
Du Tolkien, avec un épilogue bonus pour Le seigneur des anneaux, un concours, une interview du créateur de JRTM (Le Jeu de Rôle des Terres du Milieu), des extraits de la correspondance de Tolkien (où on découvre un gars bien plus détendu que les gardiens du temple qui transformeront son œuvre en évangile).
Le gros morceau de ce numéro, c’est la chevalerie, autour des questions d’honneur, avec un dossier bien fichu sur le sujet.
Le doppelgänger aurait mérité davantage de matière, d’autant que le thème est plus original et moins connu que les deux précédents.
Sommaire chargé pour ce n°10 (mars-avril 1993) à la couverture flamboyante. Annoncée depuis un bail, toujours repoussée, l’invasion viking débarque enfin avec une présentation générale des turbulents scandinaves à prolonger grâce aux nombreuses références en marge (histoire, BD, jdr, figurines, ciné…), un topo sur les revenants nordiques intéressant parce que plus original qu’un énième laïus sur les drakkars, un article sur l’esprit des sagas avec moult conseils pertinents pour créer une ambiance viking dans vos campagnes de jeu de rôle.
Deuxième gros dossier : les châteaux-forts, depuis le choix du site et le financement de la construction jusqu’à son peuplement une fois le chantier terminé, tout, tout, tout, vous saurez tout sur la motte castrale. Derrière, il faudra le défendre, ce castel, ou le prendre, grâce aux conseils de l’article sur la guerre de siège. Moi qui suis un foufou de poliorcétique, j’ai adoré.
Une double étude sur deux créatures mythiques, le griffon et le basilic, vient compléter ce numéro.
Comme tous les numéros qui paraissaient fin avril, ce n°11 (mai-juin 1993) se veut rigolo. J’ai beau être client de l’humour potache, c’est quand même pas bien foufou.
Le premier dossier porte sur l’Arcanum, une guilde de magiciens. L’article est intéressant, le club des très construit et très fouillé… et surtout très puissant. À l’arrivée, on ne sait pas trop quoi faire de cet édifice, difficile à caser dans une campagne à part de manière périphérique (genre de bibliothèque de recherches pour un perso mago), ce qui rend la multitude de détails superflus. Ou alors faudrait n’avoir que des PJ mages, à la Ars Magica, auquel cas il y a peut-être moyen de l’adapter.
Le numéro est sauvé par un copieux dossier sur les nains, avec une étude de leur caractère et de leur mode de vie, leur panthéon, leurs liens avec les autres peuples (humains, elfes, orcs), leurs barbes, leur langue, le tout complété par un article sur la Moria.
Deuxième bougie pour la revue avec ce n°12 (juillet-août 1993) qui fête l’anniversaire de Dragon Magazine avec un sujet on ne peut plus raccord avec le titre : les dragons. Dans la même veine, on a droit à une présentation de l’univers Dragonlance pour AD&D qui, comme son nom l’indique, est bourré de créatures draconiques.
Du coq à l’âne, on enchaîne avec la visite de l’Étoile de la Mort, le dragon de Star Wars, si l’on peut dire.
Au final, ça donne un numéro où le lecteur est surtout dans la peau d’un touriste à qui on montre montre ceci cela sans jamais l’impliquer. On reste passif.
Le n°13 (septembre-octobre 1993) joue sur la symbolique du chiffre porte-malheur et nous embarque dans une virée vers l’apocalypse et l’épouvante.
On démarre par une visite guidée de Ravenloft, univers AD&D à l’ambiance gothique tout en brumes et morts-vivants.
On enchaîne sur les malédictions, comment les lancer et, toujours utile, comment s’en débarrasser.
On termine sur la fin du monde, avec plein de références littéraires et cinématographiques pour s’y préparer.
Des fois que cet arsenal ne suffirait pas, une aide de jeu sur les pièges vient compléter ce numéro, qui au final est sans doute un des plus remplis et le plus cohérent depuis la naissance de Dragon.
Le n°14 (novembre-décembre 1993) n’échappe pas à la vogue d’alors : dinosaures à foison pour la sortie du Jurassic Park de Steven Spielberg. Outre le roman de Crichton et son adaptation, l’article regorge de références en romans, films, BD, JdR, animation (à compléter avec l’anthologie Dinosaures et la biographie de Michel Drucker).
Le topo sur le berserker aurait été davantage à sa place dans le dossier Vikings du n°10. M’enfin, il est là, donc on aurait tort de se priver, avec en prime la possibilité d’en jouer un dans AD&D via la description de la classe de perso dans les aides de jeu.
La virée dans les Royaumes Oubliés présentés dans le n°4 se poursuit avec un focus sur la cité de Waterdeep et le monde souterrain qu’elle abrite, Undermountain. Intéressant, mais quand on a déjà mis le nez dans le hors-série Laelith de Casus Belli, qui propose une ville complète, cet exposé paraît bien léger.
La tournée des univers AD&D continue dans ce n°15 (janvier-février 1994) avec Spelljammer, un cadre de space fantasy. L’intérêt de ce supplément était double : 1) relier les différentes gammes du jeu entre elles par le biais du voyage spatial ; 2) offrir un nouveau terrain de jeu avec un environnement original, entre Albator et Bilbo. Plus qu’un focus dans Dragon, Spelljammer aurait surtout mérité une traduction en français, qui n’a jamais vu le jour.
Sans transition, on embraye avec le kender, un genre de hobbit roublard et kleptomane spécifique à l’univers de Dragonlance (qui aurait donc été mieux casé dans le n°12).
Les autres articles sont intéressants mais random quant à leur sujet : une interview de l’illustrateur Rodney Matthews, une histoire de père Noël se fritant avec des orques, une nouvelle avec un ogre…
Du grand (sic) Dragon que ce numéro dont le contenu n’est pas mauvais mais composé de bric et de broc et d’excroissances tardives de vieux dossiers, comme si la rédac avait paniqué à la veille de rendre sa dissert’ et ramassé tout ce qui traînait pour rendre sa copie.
Le loup-garou est à l’honneur du n°16 (mars-avril 1994). Passage en revue du mythe, du jeu Loup-garou : L’Apocalypse chez White Wolf et d’une longue filmographie lycanthropique remontant aux années 1910, avec en bonus à la fin du mag’ une aide de jeu pour incarner un garou dans AD&D (adaptable à une tripotée de jeux).
La visite du multivers AD&D se poursuit, avec cette fois à l’honneur le monde de Newhon et la cité de Lankhmar, cadre de jeu qui présente pour particularité de n’être pas une création de la firme TSR, mais l’adaptation du Cycle des Épées de Fritz Leiber (dont je conseille au passage la lecture).
Le dernier dossier est consacré aux tableaux magiques (donc en clair maudits), thème original qui peut donner matière à des scénarios pas piqués des hannetons.
Pas foufou, ce n°17 (mai-juin 1994). Le combat à dos de dragon se limite au récit d’une bataille dans le monde Krynn et à un test d’une page du jeu de plateau Seigneurs Dragons, sans article généraliste sur le sujet de la guerre aérienne en fantasy alors qu’il y avait de quoi raconter (les volants dans Warhammer, le monde de Pern d’Anne McCaffrey…).
On continue la virée des mondes TSR avec Mystara, le plus ancien cadre développé par la firme. Un coup d’épée dans l’eau… La gamme est née pour jouer à Donjons & Dragons, sauf qu’au milieu des années 90, beaucoup de joueurs s’étaient déjà tournés vers la seconde édition de la version Advanced. Quand paraît l’article de Dragon, Mystara était déjà en fin de vie pour D&D et pas encore tout à fait converti pour AD&D (conversion entamée en 1994 et terminée en 1995… pour un abandon de la gamme en 1996, ça valait le coup !).
Astérix a droit à un copieux dossier (BD, films d’animation, jeux vidéo, produits dérivés, menhirs, parc d’attraction, peinture de figurines).
On n’en dira pas autant des monstres marins, relégués en fin de magazine pour une revue expresse.
Il sent bon le sable chaud, ce n°18 (juillet-août 1994) avec pour démarrer un dossier exhaustif sur Al-Qadim, univers AD&D à l’ambiance arabisante inspirée par les Mille et une nuits.
Suit un exposé sur les lieux hantés, intéressant surtout pour ses nombreuses références en littérature, cinéma et jeux de rôle. Idem pour la critique du Dracula de Coppola, qui vaut pour ses excroissances vers le JdR, le jeu de plateau et les Chroniques des Vampires d’Anne Rice, plus que pour le blabla sur le film lui-même.
Le dernier dossier est consacré au cube gélatineux, pas pour la cuisine mais dans AD&D (en gros, une espèce d’amibe géante hyper corrosive). Sujet on ne peut plus spécifique qui n’en méritait pas tant.
Le n°19 (septembre-octobre 1994) s’ouvre sur Gamma World, jeu aussi presque ancien que Donjons & Dragons, dont il est le cousin par les règles. Monde SF, post-apo, mutants, psioniques, cybernétique, y a de tout ! Sauf une traduction en VF, et en plus la dernière édition en date voyait l’abandon de la gamme “planétaire” présentée dans le dossier pour le cadre plus restreint d’un vaisseau spatial géant à explorer. À une époque où trouver des jeux traduits n’avait plus rien de la gageure que ça pouvait être dans les années 80, où beaucoup de joueurs cherchaient autre chose que du D&D et du dungeon crawling dont ils avaient fait le tour, pourquoi ce dossier (qui n’est pas mauvais, juste vain) ?
Complément au n°18 sur l’univers d’Al-Qadim, un article sur les djinns. Pourquoi maintenant plutôt que dans le numéro précédent ? Mystère…
Gros morceau qui vaut le détour avec la présentation du Cycle d’Ambre de Roger Zelazny (romans, jeu de rôle, produits dérivés). On en reparlera le jour où je me déciderai à le chroniquer.
Encore un peu d’elfes noirs en plus des numéros 0 et 6 avec la visite de Menzoberrabzan, leur capitale dans les Royaumes Oubliés.
Bref, un numéro symptomatique de Dragon Magazine : les articles sont bons, mais entre ceux qui arrivent avec des mois de retard sur les dossiers thématiqus où ils auraient dû trouver leur place et ceux dont l’objectif laisse perplexe, on se demande quelle logique prévaut dans les bureaux de la rédaction.
Des monstres, des monstres et encore des monstres, tel est le programme de ce n°20 (novembre-décembre 1994).
On attaque avec une présentation des illithids, humanoïdes à tête de pieuvre qu’on croise dans différents mondes d’AD&D. Seul regret, ne pas avoir en aide de jeu leur adaptation pour d’autres univers de jeu où ils pourraient trouver leur place, comme Warhammer, Star Wars et surtout L’Appel de Cthulhu, pourtant si riche en céphalopodes. Regret d’autant plus appuyé que le dossier suivant porte sur Arkham, Dunwich et Innsmouth, trois patelins lovecraftiens où ça cthulhuïse à donf et où on risque de se faire tentaculer à chaque coin de rue.
Des monstres encore avec une double page conseillant quelques classiques du film d’horreur (La nuit des morts-vivants, Cabal, Halloween…), et enfin, pour clore le sujet, un topo sur les araignées, de notre monde ou d’ailleurs (i.e. la Shelob de Tolkien). Soit un ensemble homogène pour les trois quarts du magazine (même la peinture de figs s’inscrit dans le thème araignées et tentacules), ce qui est assez rare chez Dragon.
Le quart restant, sans rapport avec le début (Dragon restant Dragon…), porte sur les voleurs, entre le personnage historique de Cartouche et la figure romanesque du jeu de rôle.
Numéro bien rempli !
Les elfes à l’honneur de ce n° 21 (janvier-février 1995), avec beaucoup de Tolkien et d’AD&D, donc très classique pour ses bases. Plus originaux, viennent s’ajouter les versants elfiques de Dark Sun et Shadowrun. Manque toutefois à l’appel une grosse licence, celle de Warhammer, où les elfes où ont un lore très développé dans son volet fantasy et une version futuriste pas piquée des hannetons dans 40K avec les Eldars.
Le “dossier” druide se révèle décevant, avec un simple article de présentation, alors qu’il y avait matière à développer, entre le prêtre celte historique, les grandes figures fictives (Merlin, Panoramix) et le pont évident avec les elfes juste avant (la nature, la forêt, non ?).
Dans la continuité des dossiers présentant les gammes AD&D, au tour de Planescape, permettant de voyager entre les dimensions, donc entre les différents univers du jeu. C’est plein d’idées intéressantes… tout en ne s’adressant in fine qu’à de gros joueurs possédant de gros moyens et ayant investi dans des tonnes de suppléments. Si, comme beaucoup, tu t’es contenté d’un seul monde (Greyhawk ou Royaumes Oubliés pour la majorité) ou d’un univers fait maison, Planescape en touche une sans remuer l’autre.
La “leçon de magie” annoncée en couverture est le parent pauvre de ce n°22 (mars-avril 1995) où le samouraï se taille la part du lion : un dossier de 7 pages de présentation du guerrier made in Japan, 1 page de bestiaire surnaturel nippon, 5 pages sur la vie romancée de Miyamoto Musashi, 2 pages cinéma sur la trilogie d’Inagaki Hiroshi consacrée au même Musashi, le tout formant une bonne initiation au sujet, illustrée en abondance, avec quelques références bibliographiques de base utiles pour creuser la question.
Le dossier consacré à la guerre de siège en fantasy est court mais bourré d’idées qui mixent la poliorcétique classique (remparts, catapultes, sape…) et les spécificités de l’imaginaire (invisibilité, téléportation, créatures volantes…).
Le n°23 (avril-mai 1995) offre une virée au grand large avec un premier dossier consacré à la navigation… et ses multiples dangers (pirates et sirènes).
Second dossier, le golem, d’abord d’argile dans la tradition juive, puis de chair sous la plume de Mary “Frankenstein” Shelley, et enfin de bois (Pinocchio). Angle d’approche pas courant, donc bien vu d’en avoir parlé.
Le dernier dossier, lié à l’actu BD de l’époque et à la sortie des albums de Loisel, est consacré à Peter Pan. Intéressant mais trop copieux pour un sujet aussi restreint.
Numéro bien rempli, mis à part les aides de jeu, assez anecdotiques.
À noter : le calendrier a été victime d’un décalage chronologique, avec une couverture portant la mention avril-mai, alors qu’il aurait dû s’agir du numéro couvrant mai-juin.
Au sommaire de ce n°24 (mai-juin 1995), des dragons. Encore. En l’occurrence ceux d’AD&D dans les univers Dark Sun et Royaumes Oubliés. Rien de bien nouveau par rapport à ce qui a déjà été dit à leur sujet dans les numéros antérieurs.
Ensuite, on passe au monde souterrain avec un premier article qui combine plusieurs œuvres de Jules Verne (Voyage au centre de la Terre, Les Indes Noires et Le Monde perdu), bien écrit mais qui n’apporte rien de plus aux trois romans concernés. Le second article est une imposture : “allons sur un univers AD&D assister à une conversation entre nains” annonce le chapeau. Les nains en question parlent d’un puits de mine qu’ils finissent par condamner après être tombé sur une créature de feu, armée d’une épée et d’un feu. Euh, c’est pas AD&D, ça, c’est le balrog de la Moria (donc JRTM). Il y avait tellement mieux à raconter sur le sujet (la série de romans d’Alain Paris et le JdR La Terre Creuse qui en a été tiré, la série d’animation Les Mondes Engloutis).
Le dossier sur le rôdeur relève le niveau de ce numéro peu enthousiasmant jusqu’ici.
À noter : le décalage chronologique initié au n°23 se poursuit. La couverture annonce mai-juin, alors qu’il s’agit du numéro de juillet-août.
On démarre ce n°25 (août-septembre 1995) avec un dossier complet sur le petit peuple : légendes, jeux de rôle, films, romans, BD, tout y passe. Très bon.
Ensuite, cœur de bien des scénarios de JdR, les trésors ! Dossier bien rempli sur le fond et les références, avec un article spécifique traitant des cartes au trésor.
Pour compléter le tiercé, une présentation du JdR Shadowrun (ambiance urban fantasy cyberpunk), déjà évoqué dans plusieurs articles de numéros précédents.
Cette parution estivale propose de quoi se mettre sous la dent et c’est heureux, surtout par rapport à d’autres (comme les n°12 et 18), qui sentaient un peu la rédac en vacances.
À noter : le décalage du calendrier mentionné aux n°23 et 24 est plus ou moins corrigé avec celui-ci, qui voit sauter le mois de juillet, mais sans rattraper tout à fait la chronologie initiale (à partir de ce n°25, on sera sur un bimestriel mois pair/impair au lieu de mois impair/pair).
Du lourd qui fait flop dans ce n°26 (octobre-novembre 1995). On démarre avec un sujet sur la nécromancie, copieux, nonobstant une réserve sur son cadre qui ne couvre que la fantasy, sans passer par case la SF, pourtant pas avare en résurrections. L’aide de jeu sur les conséquences pratiques, juridiques, sociales dans un univers médiéval-fantastique, ben c’est tout à fait le sujet du roman Necroville de Ian McDonald, qui aurait donc eu sa place ici.
On poursuit avec les héroïnes, historiques ou fictives : Jeanne d’Arc, Anne Bonny, le lieutenant Ripley d’Alien. S’il est plein de bonnes intentions, on regrettera le manque de profondeur du dossier (l’article sur les trolls, qui vient à la suite, est plus complet, c’est dire où on situe les femmes dans l’échelle rôliste) et le choix d’illustrations stéréotypées (petites tenues et grosses poitrines à foison).
Le dernier dossier est consacré à la BD Légendes des Contrées Oubliées (cf. ma chronique).
Bilan : pas bien foufou tout ça…
Le n°27 (décembre 1995-janvier 1996) voit grand avec un premier volet consacré aux géants, créature présente dans de nombreux contes et univers et au final assez peu connue. On en saura désormais un peu plus sur la question, même si elle est traitée ici dans tous les sens (des nains, H.G. Wells, un haricot magique, la mythologie grecque, Barnum, Rabelais, Swift, yolo !).
Suit une présentation des Terres du Milieu originale, puisqu’elle s’attarde sur les Quatrième et Cinquième Âges, ce qui change des éternels Silmarillion, Hobbit et SdA.
Annoncé sur la couv’, le barde a droit à son giga-dossier, complet dans ses aspects tant historiques qu’imaginaires et assorti d’aides de jeu pour AD&D, où il était la classe jouable fourre-tout (un peu guerrier, un peu voleur, un peu magicien, polyvalent sur le papier, optimal en rien à la vérité, donc la classe “pur rôle”, la plus fine et la plus complexe à jouer).
Le n°28 (février-mars 1996) inaugure la nouvelle maquette… qui concerne surtout la couverture et le sommaire. La physionomie des dossiers et des aides de jeu ne change pas (hormis la qualité médiocre de la plupart des illustrations). Une BD (pas convaincante) chasse l’autre. Seul vrai changement, une nouvelle rubrique, “Les investigations de frère Willhem” (un genre de Guillaume de Baskerville), remplace la course de la Drakomega (qui ne m’avait jamais emballé) et s’annonce pleine de promesses.
Les trois dossiers restent classiques et random comme à l’accoutumée. Primo, les familiers, ces bestioles qui accompagnent sorcières et magiciens. Intéressant pour creuser l’identité d’un perso lanceur de sorts.
Secundo, les marchands, intéressant aussi vu que les joueurs en rencontrent beaucoup pendant leurs aventures (achat de matos, revente de butin, missions d’escorte…).
Tertio, méga dossier sur Birthright, nouvel univers de campagne AD&D que TSR venait de sortir. Un de plus. En anglais, par-dessus le marché, ce qui devenait à l’époque un repoussoir quand tant d’autres jeux étaient disponibles traduits. M’enfin le dossier en lui-même est bien fichu pour présenter ce décor, archi-classique en termes de fantasy (donc là aussi, comme pour la langue, dix ans de retard) mais original dans ses mécanismes de campagne.
Le n°29 (avril-mai 1996) s’ouvre sur un thème original : les plantes. Pourquoi pas, en fantasy, le sujet peut en intéresser plus d’un, druides, voleurs/assassins pour les poisons, classes de heal pour les plantes médicinales, mages pour les potions… Ici, on s’oriente plutôt sur les plantes carnivores, ce qui est quand même bien pointu et restreint pour alimenter un dossier complet.
Le dossier suivant, sur les prêtres, loupe lui aussi le coche. Alors que le sujet méritait de démarrer sur une approche générale et historique, comme ç’avait été le cas pour les chevaliers ou les Vikings dans de précédents numéro, on se trouve ici embarqué dans un cadre hyper spécifique (un bled précis, Port-Ponant, dans un univers précis, les Royaumes Oubliés, pour un jeu précis, AD&D). Le second article est quant à lui hyper nébuleux.
Pour clore le triptyque, numéro d’avril oblige, Serge Brussolo nous emmène en voyage vers des mondes absurdes, dans un esprit très Douglas Adams. Fou et décalé, certes, mais aussi redondant avec certaines publications avriliennes antérieures.
Sans doute le moins bon numéro de Dragon depuis sa première parution…
Cinquième anniversaire de Dragon au sommaire de ce n°30 (juin-juillet 1996).
Après un édito où la rédac espère une grande longévité au magazine, le premier dossier se penche sur… les tueurs de dragon. Fallait oser. Sujet intéressant, parce qu’il a souvent été question dans le magazine de chasse aux dragons et des moyens pour vaincre ces bestioles cuirassées mais très peu de ceux qui en font profession. S’ajoute un article sur la similitude entre le dragon et le cochon, à savoir que dedans, tout est bon… et monnayable.
On poursuit avec les légendes arthuriennes, dans leur version canonique d’avant Kaamelott, pour un tour d’horizon de la Bretagne, bien documenté.
Cerise sur le gâteau, les pouvoirs psioniques dans le fantastique et la SF, dossier dont on regrettera qu’il se contente de passer des œuvres en revue sans creuser beaucoup plus. Au moins, il ouvre pas mal de portes vers la littérature et le cinéma.
Mission accomplie pour ce numéro anniversaire bien rempli !
Du lourd au programme de ce n°31 (août-septembre 1996) avec deux dossiers bien fichus, le premier sur les bibliothèques, le second sur les assassins. Seul petit regret, l’un et l’autre restent très ancrés dans la fantasy médiévale en laissant de côté la SF, pourtant riche en bibliothèques numériques et en robots tueurs (le T-800 pour ne citer que le plus célèbre).
La SF, justement, a droit à son dossier spécifique, consacré aux “créatures des étoiles”, bestiaire où l’on croise le xénomorphe d’Alien (déjà en vedette du n°3), le chasseur de Predator, la mimique de Mimic, le truc de The Thing. Survol léger qui ne creuse pas la notion de monstre extraterrestre et les thèmes associés (le plaisir très humain de la chasse, l’ennemi intérieur, la paranoïa, l’infection…).
On révise les bases avec ce n°32 (octobre-novembre 1996) qui propose trois sujets archi-classiques : les sorcières, les épées magiques (ou mythiques, pour le coup, puisqu’en plus des traditionnelles Excalibur et Stormbringer, il est aussi question du katana et du sabre-laser) et enfin les cités perdues.
Le proverbe à base de vieux pots et de meilleures soupes fonctionne dans les grandes lignes. Sur ces thèmes éculés, les dossiers parviennent à ne pas être ennuyeux, ce qui est déjà pas mal. Après, les sorcières auraient mérité un traitement plus en profondeur (i.e. sur le plan historique, en particulier dans le cadre de l’histoire sociale des périodes médiévale et moderne ; cf. les travaux de Robert Muchembled). Quant aux cités perdues, le récit AD&D aurait gagné à être raccourci pour allonger en proportion l’article sur les villes et continents mythiques (Troie, Atlantis, Mû, Ys, l’Eldorado…), trop court et frustrant (ce qui prouve dans le même temps qu’il a réussi son pari de donner envie d’en savoir plus).
Un bon numéro, avec beaucoup de choses dedans, mais pas forcément celles qu’on aurait voulu avoir.
Après les épées magiques du numéro précédent, le n°33 (décembre 1996-janvier 1997) poursuit avec un autre produit phare de la gamme des objets enchantés : l’anneau. Sans surprise, el famoso Unique de Tolkien tient le haut du pavé dans ce dossier.
Morceau de choix avec le dossier suivant qui porte sur les croisades en Terre sainte. Pour avoir pratiqué le JdR Miles Christi, j’avais pas mal arpenté le coin à l’époque (l’époque de Dragon, j’entends, pas le XIIe siècle, je ne suis pas si vieux) et ce Dragon avait été utile pour la somme d’infos qu’il renferme.
On conclut sur les fantômes, avec une typologie de revenants (qui aurait gagné un développement d’une ou deux pages supplémentaires) et une présentation de la BD Gorn (cf. ma chronique de Même la mort, le premier tome). L’aide de jeu proposant d’incarner un revenant, prévue pour AD&D mais transposable dans n’importe quel univers, n’est pas utilisable en tant que telle, mais offre une bonne piste pour un MJ facétieux qui voudrait “fantomiser” ses joueurs à titre temporaire (le temps d’un scénar) ou définitif (si tout le groupe claque d’un coup suite à un combat foireux, c’est une bonne occasion d’une dernière aventure d’outre-tombe avant de recréer des persos).
Ma collection s’arrête ici.
Ce n°36 (juin-juillet 1997) a dû être acheté par mon frangin et atterrir dans mes affaires, tout comme quelques Casus Belli des années 1997-1999.
Il n’apporte pas grand-chose. Numéro anniversaire, donc avec un dossier sur les dragons, comme à chaque anniversaire. Les créatures alliées des draconides, comme sujet, ça aurait pu, mais l’essentiel est une redite du numéro 0.
Sur le versant SF, le dossier sur les robots, avec du Asimov dedans, est aussi une redite du numéro 0.
Le dernier sujet sur la cuisine n’offre, et c’est un comble, pas grand-chose à se mettre sous la dent. Perso, je n’aurais fait qu’un seul article sur la bouffe, pas deux, et l’aurai intégré dans un dossier plus large sur les auberges et aubergistes, qui restent une valeur sûr du JdR de fantasy. Combien d’aventures ont commencé par “vous êtes dans une auberge” ?
Conclusion
Le n°33 de janvier 1997, c’est le moment où j’ai décroché de Dragon. Pas pour des raisons qualitatives, le magazine avait envoyé du lourd sur les derniers numéros que j’ai achetés. Marrant de se dire que pour un magazine lancé surtout pour parler des produits TSR, c’est finalement quand il aura pris ses distances avec la maison-mère et moins parlé d’AD&D qu’il aura atteint son meilleur niveau. Non, ça a été un tout, qui a touché aussi les autres revues, je pense à Casus Belli, dont j’ai été lecteur assidu jusqu’au n°101 (janvier 1997 aussi). J’ai pourtant continué à pratiquer le jeu de rôle une dizaine d’années, mais sans magazines. Il y a eu beaucoup de choses qui ont fait que… Mon état d’esprit… la somme de connaissances et références acquises en imaginaire qui faisait que j’en apprenais moins à chaque numéro… les priorités du moment, budgétaires entre autres, avec des nouveaux postes de dépense et des finances pas extensibles à l’infini, ce qui a amené le pognon dépensé en revues à partir vers les bouquins pour la fac et les jeux vidéos. Moins de dépenses en magazines, ça voulait dire aussi davantage d’achats de suppléments de jeu de rôle.
Ouais, parce que quand on fait la somme de tout ce que j’ai investi en Dragon et Casus, j’aurais pu me payer quelques gammes complètes. Mais bon, j’ai jamais regretté. J’ai voyagé, appris, rêvé, emmagasiné des tonnes de souvenirs de parties liées au contenu de ces revues, découvert des films, jeux, livres, univers, personnages, auteurs, illustrateurs, dont je n’aurais sinon jamais entendu parler ou beaucoup plus tard.
Les pages de Dragon et Casus n’ont pas seulement eu un poids massif pour forger le contenu de mon imaginaire, elles ont aussi modelé ma façon de l’aborder. Une vision englobante, où se mêlent les genres, les formats, les médias, les supports. Où tout se relie. Et en prime une vision inclusive, qui ne laisse rien ni personne sur le bord de la route, où chaque chose a sa valeur et participe d’un tout sans qu’on puisse le retirer de l’équation. Où la littérature n’est pas par essence élitiste et supérieure au cinéma qui serait, lui, populaire. Où le wargame n’est pas plus intello que le jeu de rôle. Où la hard science n’est pas meilleure que le space opera, juste parce que querelles de clocher. Une vision horizontale, sans supériorité de ci sur ça, où chaque élément a sa place à égalité avec le reste. Y compris les gens (faut quand même noter que dans un univers rôliste à dominante masculine dans son effectif, j’ai quand même terminé ma carrière à diriger des parties avec un groupe où il y avait plus de filles que de garçons).
Et puis, cette façon de mélanger les références et les univers… Quand Dragon proposait dans son numéro 3 de coller un xénomorphe d’Alien dans l’univers médiéval-fantastique de Donjons & Dragons, voilà quoi. D’où croyez-vous que je tiens ma faculté à croiser les effluves comme un malade dans mes détournements, où Batman s’entrechoque avec Full Metal Jacket, où Robocop cite Gandalf, où Star Wars rejoint Highlander ? Mon imagination folle ne vient pas que de là, mais les revues de jeu de rôle y ont été pour beaucoup.
Tout ce que je fais sur Un K à part et dans ma façon de le faire est marqué par cet héritage.
(Cette revue a été récompensée par un K d’Or.)
Amusant de lire cela, au détour d’une recherche google 🙂
J’ai été le rédac chef, à partir du 27 et j’avais commencé à bosser dedans dès le 0 (après un passage dans Quest et quelques passages dans Graal).
Un plaisir de voir que ce magazine vous a accompagné. C’était le but. Et pour moi, ce sont également de supers souvenirs.
@Noël : Ah ça, Dragon aura marqué toute une génération de rôlistes et amateurs d’imaginaire. 😉
Graal et Quest, ça me dit quelque chose, mais de très très loin, aucun des deux n’était distribué dans la maison de la presse de mon patelin à l’époque.