Quelques BD antédiluviennes ressorties des tréfonds de ma bibliothèque… La plus récente date de l’an 2000, c’est dire si ça ne va rajeunir personne !
Voici l’histoire d’un juge, d’un Romain, d’un chat et d’une succube qui rentrent dans un bar…
Judge Dredd – Megacity Blues
Simon Bisley, Alan Grant & John Wagner
Comics USA
Ayant la flemme de présenter le personnage, on va partir du principe que tout le monde connaît Judge Dredd. Sinon, il existe un truc formidable qui s’appelle Internet et te renseignera très, très bien sur le sujet.
Megacity Blues, je l’ai lu pour la première fois quand j’avais une quinzaine d’années. À l’époque, j’étais passé à côté de pas mal de choses. L’album contient plusieurs histoires déconnectées les unes des autres, toutes s’inscrivent dans un contexte supposé connu. Il ne s’agit pas d’un tome de mise en place de l’univers, tu prends le train en marche. En 1991, pas d’Internet, donc pour la pêche aux infos, c’était une autre paire de manches que maintenant. Quand on n’avait jamais mis le nez dans les aventures du juge, fallait deviner en extrapolant à partir des éléments distillés dans l’album. De nos jours… Ben c’est quand même mieux d’avoir le nez dans les volumes qui mettent en place le bousin avant de s’aventurer dans Megacity Blues.
Donc c’est du Judge Dredd, univers post-apo ultra violent, avec son personnage de flic hyper bourrin, le tout raconté avec un humour super raffiné (ou pas). Dans le genre potache, on assiste par exemple ici à la fouille rectale d’un artiste de cirque appelé le Grand Troudini. Les douaniers vont lui extirper du fion ce qu’un magicien sort d’ordinaire de ses manches ou de son chapeau… et bien plus encore. Fin, délicat, classieux.
Alix
T.8 Le tombeau étrusque
T.11 Le Prince du Nil
T.18 Vercingétorix
Jacques Martin
Casterman
Les Alix, j’en ai lu plein quand j’étais petit. À l’époque, je croyais que le Jacques Martin qui dessinait et scénarisait la série était le même gars qui présentait L’École des Fans. Quelle idée de porter le même nom et le même prénom… Je sais pas, mais portez des numéros, comme les Louis de l’histoire de France. Eux, on les confond pas, alors qu’ils s’appellent tous Louis.
Alix, j’aime bien, parce que la série est très bien documentée. Rien que pour voir des légionnaires romains en cotte de mailles plutôt qu’avec l’armure à bandes anachronique popularisée dans Astérix, déjà, ça vaut le coup. Ambiance, dessin, informations historiques, le travail de recherches et de rendu atteint un niveau inégalée d’exactitude. Les erreurs sont rarissimes et ne concernent jamais que des détails qui ne gênent en rien la lecture (genre une colonne qui s’est trompée de style architectural, à l’arrière-plan, paumée dans le décor, y a pas de quoi crier au scandale). Au-delà de sa précision documentaire, la série fait la part belle à l’aventure et à l’exotisme. Une belle plongée dans le monde romain, quand la République vit ses dernières heures.
Dans Le tombeau étrusque, Alix est aux prises avec une bande de fanatiques religieux adorateurs du dieu Moloch, qui profitent de la guerre civile pour se livrer aux pires fantaisies à base de sacrifices humains. S’ajoute un complot pour restaurer la puissance étrusque et la royauté, alors que les deux sont passées de mode depuis quelques siècles déjà.
Dans Le Prince du Nil, encore un complot qui vise encore à une restauration. Il s’agit cette fois de la monarchie pharaonique à l’ancienne, elle aussi passée de mode depuis que les Lagides sont sur le trône.
Dans Vercingétorix, on croise, je vous le donne en mille, Vercingétorix. Échappé de sa prison, il retourne à Alésia pour un dernier affrontement avec César. Genre le mec, il a pas gagné la première fois à la tête de toute l’armée gauloise, mais il va quand même retenter le coup en solo…
Le Chat, T.10 Le Chat est content
Philippe Geluck
Casterman
Drôle, absurde, noir, caustique, décalé, potache, c’est le Chat, avec son humour qui fonctionne bien en strip de trois cases ou sur un unique dessin, l’album étant par ailleurs parsemé de vieilles gravures retouchées et pourvues de dialogues qui font la part belle aux vannes à deux ronds cinquante.
Succubus, la guerre des âmes
François Froideval & Cyril Pontet
Zenda
Une succube, des démons, du cul, des boobs, de la violence, de l’humour potache, soit un cocktail très marqué par l’esprit des premiers albums des Chroniques de la Lune Noire, comme une espèce de spin-off sous acide de la série phare de Froideval – on a d’ailleurs droit, l’espace d’une case, à un caméo de la succube rouquine. Sauf qu’ici les curseurs sont poussés encore plus à l’extrême, sans se prendre au sérieux, tout en déconne décomplexée à la manière du jeu de rôle In Nomine Satanis.
Le scénar est quelque peu décousu, on suit moins une histoire structurée qu’une succession de sketches raccordés entre eux parce que “c’est magique”. M’enfin, la BD fait le taf question détente, le portrait brossé de l’enfer joue assez bien du croisement entre éléments canoniques et fantaisies délirantes, et in fine on suit sans déplaisir les aventures loufoques de Sellenia et de ses deux acolytes démoniaques.
La guerre des âmes devait être le premier volume d’une série, Froideval ayant annoncé à l’époque travailler sur un tome 2, l’album sera finalement un one-shot. Alors autant Les Fées ou Methraton, c’est pas un mal d’avoir arrêté le tir et les dégâts, autant Succubus, je trouve dommage de ne pas être allé plus loin. Il y avait encore matière à raconter sur le fonctionnement de l’enfer sauce Froideval et le personnage de Sellenia pouvait se voir développé dans des directions aussi intéressantes que déjantées.