Warhammer Battle & Warhammer, le jeu de rôle fantastique

La licence Warhammer est sans doute une des plus étendues dans l’univers ludique.
Elle naît en 1983 avec Warhammer Fantasy Battle, un wargame médiéval-fantastique avec figurines. Le concept est décliné en jeu de rôle en 1986 et en wargame futuriste avec Warhammer 40,000: Rogue Trader en 1987. Puis en jeu de foot américain (Blood Bowl, 1986), de batailles navales (Man O’War, 1993) et spatiales (Battlefleet Gothic, 1999), de plateau (Space Hulk, Space Crusade, Heroquest). Avant même d’avoir atteint l’an 2000, on compte déjà une quinzaine de déclinaisons sur table. À l’heure actuelle, tous supports confondus, la totalité des titres parus remplit un bottin, puisqu’en plus des JdR et des jeux de figurines, on compte aussi plusieurs séries de romans, des comics, quelque chose comme une soixantaine de jeux vidéo, un film d’animation (l’inénarrable Ultramarines).
Si au final WH40K se taille la part du lion et reste le titre-phare de Games Workshop, revenons sur le versant fantasy de la licence, puisque c’est par lui que tout a commencé.

Warhammer Fantasy Battle V2 VF

Warhammer Battle
Games Workshop / Agmat Citadel

Tout a commencé avec les livres dont vous êtes le héros, qui m’ont amené vers le jeu de rôle Les Terres de Légende. Le sujet JdR m’a fait découvrir le magazine Casus Belli dans les pages duquel j’ai appris l’existence d’un wargame avec figurines : Warhammer Battle.
Une boîte en carton rigide, trois livrets de règles (combat, magie, bestiaire) et c’est tout. La troupe, fallait investir à côté en ces temps jadis de V2 (1984, sans lien de parenté avec Orwell).
Les règles de base sont simples, avec une action séquencée (mouvement, tir, corps-à-corps, magie, moral) simple à comprendre et à appliquer. On reste dans des mécanismes très inspirés du wargame historique. En faisant sauter la phase de magie, les règles fonctionnent même très bien pour des affrontements couvrant l’Antiquité, le Moyen Âge et les débuts de la période moderne (au-delà, ça devient plus compliqué avec la prédominance du feu sur le choc et la portée ainsi que la puissance des armes à feu).
La magie reste très abordable aussi dans ses mécanismes avec tout un lot de buffs et débuffs (in fine de simples modificateurs aux jets de dés), attaques magiques (du tir, quoi), poses d’obstacles sur le champ de bataille (mur de feu, sables mouvants…).
Côté unités, on ne se casse pas le tronc sur les profils. Un orque est un orque, point. Pas d’unités spécialisées avec des profils spécifiques, de variantes avec des caractéristiques comme ci ou comme ça, de déclinaisons qui donnent tel ou tel bonus. Simple. Trop sans doute. Mais au moins, on n’était pas obligé d’acheter certaines figurines en particulier pour pouvoir jouer telle unité. On n’était même pas obligé d’acheter du Citadel, les figs de n’importe quelle marque pouvait trouver leur place. Et à la place des personnages nommés qui, en plus de te forcer à investir chez Games, coûtent la peau du cul, on avait un système de champion, héros mineur et héros majeur. On prenait une figurine qu’on aimait bien, un peu classe, un peu badass, et hop, le tour était joué, on avait un chef à pas cher (qui avait en plus le bon goût d’être plus fort que la moyenne sans devenir pour autant un one-man army susceptible de déséquilibrer l’affrontement).
Simple, accessible, flexible, moins riche que les versions ultérieures qui offrent plus de variété dans les unités mais beaucoup moins rigide aussi.

Warhammer le jeu de rôle fantastique Jeux Descartes

Warhammer, le jeu de rôle fantastique
Games Workshop / Jeux Descartes

Quand le temps a été venu de passer des Terres de Légende à un jeu plus riche et complexe, la question s’était posée. Warhammer ou AD&D ? J’ai beaucoup hésité entre les deux. Avantage de Warhammer, je connaissais le contexte pour pratiquer le jeu de figurines ; avantage d’AD&D, c’était le jeu qui bénéficiait du plus d’aides de jeu et de scénarios dans les revues Casus Belli et Dragon Magazine. Je suis parti sur le second sans jamais regretter mon choix. Mais bon, je serais parti sur Warhammer, j’aurais pas regretté non plus, je pense.
De toute façon, j’ai pu tâter des deux. AD&D, pour avoir investi dedans et y avoir passé plus de temps, je crois, que tous les autres JdR réunis que j’ai pu pratiquer. Quant à Warhammer, un pote avait monté un groupe sur Lille au début des années 2000, ce qui m’a donné l’occasion de jouer un paquet de scénars et quelques campagnes. Verdict : les deux jeux ont autant de points communs que de différences. On pourrait s’amuser à les renvoyer dos à dos pendant des heures sans que la comparaison mène où que ce soit. L’important dans un jeu, c’est surtout ce qu’on en fait et le plaisir qu’on y trouve. Je me suis marré sur les deux, ite missa est.

Esquissé dans Warhammer Battle, l’univers gagne en consistance quand il est décliné en jeu de rôle. De base, il n’a rien de bien original à offrir. Du médiéval-fantastique, ce que Dungeons & Dragons fait déjà depuis quelques années. Des orques, des nains, des elfes, de la magie, rien de bien nouveau sous le soleil. Quant à l’inspiration historique, Howard avait déjà fait le coup avec le monde de Conan demi-siècle auparavant. Ici, on aura un Empire proche de ce qu’était le Saint Empire Romain Germanique début XVIe, une Bretonnie qui mêle la France du XIIIe siècle et le cycle arthurien, des Rois des Tombes qui empruntent beaucoup à l’Égypte pharaonique, des Slanns au look aztèque, une Norsca à l’ambiance viking…
Bref, rien de bien révolutionnaire, ce qui fait qu’on se demande comment le jeu a pu marcher. Son classicisme y est sans doute pour beaucoup : l’avantage de ne rien bouleverser, c’est de parler au plus grand nombre. Il n’y avait pas non plus une énorme concurrence à l’époque de sa sortie. L’argument économique jouait aussi : un seul livre avec tout dedans, quand il en fallait au moins trois pour AD&D (livre du maître, guide des joueurs, bestiaire) et même avec le trio en main, t’avais pas d’univers fourni, fallait encore en acheter ou en bâtir un.
Ce qui a marché aussi dans le cas de Warhammer, c’est d’avoir été capable, à partir d’éléments qui ne sortaient en rien des sentiers battus, de proposer un univers qui tienne debout, avec quelques ajouts maison qui ont su faire la différence. Les skavens, par exemple. Et surtout le Chaos.
Le bouquin affiche comme phrase d’accroche “un univers féroce d’aventures périlleuses” et c’est bien ce qu’on a, d’où une ambiance particulière. La base de l’univers est celle, classique, d’un monde en devenir, où on imaginerait sans peine une unification à terme de l’Empire, l’exploration de la Lustrie et l’installation de colonies comme dans les Amériques aux XVIe-XVIIe siècles. Bref, une trajectoire cousine de celle de notre monde à nous. Sauf que non. Sans aller jusqu’à dire qu’il flotte un parfum de fin des temps, faut bien reconnaître que les menaces sont légion et que tout pourrait s’arrêter du jour au lendemain en ne laissant que des terres dévastées avec pas grand chose de vivant dessus. Soit une ambiance particulière de “tout est possible… mais pas sûr”, plus intéressante à mon sens que la direction prise par la suite qui voit une évolution à la WH40K très sombre et désespérée, trop dans le sens où on finit par n’en avoir plus rien à foutre, puisque tout est perdu d’avance quoi qu’on tente. Ça fonctionne dans 40K qui a été conçu dans cette optique, beaucoup moins dans le Vieux Monde.

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