Sans être exceptionnel, Rouille avait le mérite de proposer un univers intéressant. Il paraissait prometteur pour la suite, sous réserve de corriger les défauts de jeunesse. J’avais donc des attentes quant aux Noces de la renarde. J’avoue être tombé de haut. Il est rare qu’une lecture me donne l’impression d’avoir perdu mon temps. C’est le cas ici, une déception.
Mais sinon, tout va bien ! Max Deloy HarperCollins / &H
Premier roman signé Max Deloy, je me suis donc livré à quelques recherches sur cet auteur, histoire de mieux le connaître. Jeune écrivain inconnu ? À voir. Le bonhomme ne fait pas son âge, mais il est en réalité très très vieux. Quant à son œuvre, tout le monde en a entendu parler à défaut de l’avoir lue. Car c’est à lui que Napoléon Ier confia jadis la rédaction du Code civil, ouvrage qui rassemble un max de lois. Deloy prit des tripes pendant la restauration et le chemin de l’exil sous la Restauration. On le vit arpenter la terre de Flandre, de Dunkerque à Anvers, en passant par Hallennes-lez-Haubourdin, Coxyde ou encore Saint-Folquin. Un périple tout à pinces, en hommage aux preux chevaliers Yvain et Gauvain, surnommés “les petits pédestres” dans les chroniques d’Astier de Lyon (1274-1312). Impressionné par la démarche caractéristique du père Max, le général prussien von Etick obligea ses troupes à défiler de la même façon. À cause d’une maîtrise approximative du français, von Etick transcrivit l’expression en “pas de l’oie”, ce qui ne rime aryen à rien puisqu’on n’a jamais vu d’oies avec des casques à pointe. Lassé de courir les routes, le randonneur décida de poser ses valises. Son choix de résidence se porta sur San Antonio, où il fonça dare-dare. L’ennui aidant, il finit par succomber au démon du jeu, Deloy. Pour éponger ses dettes, il se lança dans la fabrication de buvards, expérience infructueuse qui le conduisit à enchaîner les petits boulots : gardien du cimetière des morts qui chantent, cureur de nez, guichetier de péage sur l’A16, équarrisseur aux abattoirs dans la dune, réducteur de fractures, sosie de Freddie Mercury. Mais sinon, tout va bien ! est (plus ou moins) son premier roman.
Une petite ville nazie William Sheridan Allen 10/18
Quand tu étudies le nazisme, tu en reviens toujours à la question fondamentale : comment ça a pu arriver ? Des tas d’historiens ont très bien expliqué le phénomène au plan global de l’Allemagne, Allen, lui, s’intéresse à l’échelle locale. On ressort de son bouquin avec le sentiment que la microhistoire est plus effrayante que toute la littérature d’épouvante réunie.
Il court bien des rumeurs au sujet des Halliennales. Le fait que j’inonde chaque semaine les forums complotistes de théories plus perchées les unes que les autres n’y est sans doute pas étranger. La légende du festival installé sur un cimetière indien ? C’est bibi. L’installation des stands par les mêmes aliens qui ont bâti jadis les pyramides d’Égypte ? C’est moi aussi. Les fées et farfadets planqués sous les tables pour donner du bonheur aux auteur(e)s pendant les dédicaces ? Une de mes grandes révélations sur les sites “bien informés”. Maintenant, tu sais pourquoi tout le monde a le sourire jusqu’aux oreilles. Les chemises de Maxime Gillio tissées en poil de licorne ? Bon, sur ce coup-là, on était plusieurs mais je ne balancerai pas mes complices. Tiens, puisqu’on parle de Gillio, lui et ses liquettes font partie de l’équipe qui organise le salon. Il va nous raconter comment ça se passe dans l’arrière-boutique et démêler la légende de la vérité (ou l’inverse).
A long time ago mais pas far far away, vu que j’étais assis dans le même fauteuil que maintenant, j’avais évoqué le projet Noces d’écailles. On n’en était alors qu’aux fiançailles, avant la cagnotte Ulule destinée à pourvoir la bête de sa dot. S’ensuivirent moult tribulations propres à redéfinir la notion de retard dans la publication d’un ouvrage. Comme dit un proverbe médiéval, “mieulx vault chois en la date qu’intenable dædlaÿne”. Bon an mal an, les épousailles ont fini par avoir lieu quelque part dans un coin perdu du khanat bulgare. Le précieux grimoire vient d’atterrir entre mes blanches mains. Enfin, le moment tant attendu de consommer l’union entre l’œuvre et le lecteur. La nuit de noces propice aux corps qui ondulent, aux rimes profondes et à toutes les turpitudes draconiques. Et là, t’as pas idée d’à quel point je dois me retenir de remplacer le “a” du titre par un “ou”.