Retrouvailles avec Stan Kurtz à l’occasion de l’opération Baraka, lancée cet été par la maison Faute de Frappe ! En pleine canicule, cette promo avait des airs de baraka frite, ce qu’était assez dans le ton pour une ME sise din ch’Nord.
Stan Kurtz
Tome (plus ou moins) 9, Détour
Marc Falvo / Stan Kurtz
Éditions Faute de Frappe
Neuvième roman mettant en scène Stan Kurtz, dixième aventure en comptant l’épisode bonus audio Aenigma, troisième volume de l’épopée kurtzienne paru chez Faute de Frappe, premier titre inédit chez ladite maison d’édition (les deux autres, Série B et Triviale poursuite, étant des rééditions), bon dernier de la liste si on suit les dates de parution mais troisième en vérité dans la chronologie de la série… tout en se situant en marge de l’arc narratif initié par Série B et continué dans Triviale Poursuite, puisqu’il s’agit, ainsi que l’indique son titre, d’un “détour”, un épisode stand-alone comme on dit en bon yaourt franglais (sinon, épisode indépendant, ça marche aussi).
Si les volumes étaient numérotés, Détour porterait donc le dossard 2,5.
Les volumes ne sont pas numérotés. Ah…
Là j’en vois parmi vous qui se demandent à quoi peut donc bien rimer cette intro pleine de chiffres et de lettres à faire chialer de jalousie le jeu télé éponyme, si à l’arrivée on ne tire aucun numéro gagnant. La raison de ce paraphe est simple : c’est parce que j
Pour les lecteurs qui prendraient le train et les aventures de Stan Kurtz en marche, icelui œuvre comme détective privé et antihéros public, narrateur de ses propres enquêtes, aidé dans cette dernière tâche par Marc Falvo, le docteur Watson invisible, el grande litteratore del ombre de la Vega y don Diego comme on l’appelle au Mexique.
Or donc, dans ce Détour, notre infra-détective préféré débarque dans une petite ville avec sa gare locale, son bar local, son hôtel local, son shériff local, sa pègre locale. Bref, tout il est local et pas piqué des hannetons qui s’en vont couper les joncs. Un parfum de western flotte sur cette aventure où l’ami Kurtz endosse le rôle du cow-boy solitaire débarquant dans un patelin paumé où il provoque un joyeux bazar.
Plutôt que tartiner cinquante lignes de redites, je vous renvoie aux chroniques linkées en fin d’article sur les volumes précédents. Tout y est sur le style, la narration, l’ambiance, la truculence des personnages et tutti frutti. Ce tome est de la même eau avec aussi du neuf qui vaut, c’est le cas de le dire, le détour, puisqu’on apprend quelques infos sur la jeunesse de Stan et comment il est tombé dans la marmite du polar quand il était petit.
Pour ma part, j’ai pris grand plaisir à retrouver le père Kurtz, son imper et son chapeau à la Marlowe, son parlé à la San-Antonio et son univers qui marie les codes du roman noir à un absurde que ne renieraient pas les Monty Python. Une bonne pioche qui m’a assuré une soirée de lecture intéressante. Banco !
Plus que du contenu du bouquin, je vais surtout profiter de l’occasion pour parler de l’expérience Faute de Frappe. Après tout, un livre ce n’est pas qu’un texte et un auteur, c’est aussi un univers éditorial autour. Donc voilà on se lance dans la chronique d’une maison d’édition. Parce que pourquoi pas.
Faute de Frappe est une jeune ME indépendante, basée près du cercle polaire à Lille. Elle a été fondée par Marc Falvo, qui y édite ses propres bouquins. Il a le bon goût de ne pas s’en cacher, ce qui n’est pas le cas de tous les auteurs qui éditent leurs propres ouvrages via une structure fondée par eux-mêmes. Il a raison, Falvo, y a pas de honte à éditer des livres, à plus forte raison les siens, on n’est jamais mieux servi que par soi-même. Mais bon, en France, l’auto-édition, c’est toujours mépris et compagnie, comme tout ce qui sort du circuit traditionnel et sclérosé. Faut vous mettre à la page, les gens, on n’en est plus aux polycopiés reliés à l’agrafeuse, on trouve facilement de l’auto-édition d’excellente qualité parfois supérieure aux ME installées de longue date et habituées à se reposer sur leurs lauriers.
Bref. Falvo, sa maison, ses livres. Mais pas que. D’autres auteurs figurent au catalogue (Hervé Hernu, Michaël Moslonka, Virginie Singeot-Fabre, Christophe Jean, Bertrand B.). Le mieux, c’est encore de voir de vos yeux voir en allant vous faire une idée sur le site de FdF.
Concernant la politique éditoriale des aventures de Stan Kurtz, j’ai trouvé intéressante la démarche de glisser un inédit parmi les rééditions. Ça permet de capter les lecteurs vétérans du temps de feu Fleur Sauvage en leur proposant du neuf à se mettre sous la dent. À l’arrivée, tout le monde est content, des bleusailles qui découvrent la saga aux briscards qui peuvent ajouter de nouveaux trophées aux côtés des anciens dans leur bibliothèque.
Sur Détour, j’ai pu constater que le taf était fait et bien fait. La mise en page du texte ne rogne pas sur les marges pour gratter deux malheureux feuillets à l’impression. Clair et lisible, plus confortable à lire que certains placards qui te couvrent la page pour ainsi dire d’un coin à l’autre en mode économie de bouts de chandelle (i.e. Le sentiment du fer). Propre aussi, avec un texte corrigé bien comme il faut, sans coquilles (un comble quand on s’appelle Faute de Frappe !). À l’heure actuelle où la correction est de plus en plus négligée par les éditeurs (i.e. La nuit des cannibales), ça fait toujours plaisir de voir que les cultistes de Louis-Nicolas Bescherelle n’ont pas dit leur dernier mot. Pour emballer le tout, une couverture réalisée par Bertrand Binois, qui connaît le métier. Donc une autre tenue que du Shutterstock bidouillé par un sagouin avec trois pauvres filtres Photoshop. L’ensemble tient la route et survit à lecture sans tomber en morceaux (on n’en dira pas autant de mon exemplaire de Du feu de l’enfer, qui perdait des pages avant même que j’en aie lu la moitié…). À noter que le bouquin est imprimé en France et en silence, donc une autre philosophie que certains éditeurs qui braillent pour la défense de l’édition hexagonale tout en faisant turbiner à plein régime les presses espagnoles, italiennes, polonaises ou tchèques.
Quant aux versant commercial de l’opération, rien de négatif à signaler, tout a été comme sur des roulettes. Tarifs corrects, pas de souci technique à la commande en ligne, expédition et réception rapides, j’ai même eu une dédicace en prime sur mon exemplaire.
Verdict : de la belle ouvrage de A à Z. Comme quoi, en matière de maison d’édition, on peut en avoir une toute petite et rivaliser en qualité avec les plus gros morceaux du secteur.
En bonus, les liens vers les chroniques des aventures de Stan Kurtz, pour t’éviter de farfouiller au pifomètre sur le blog :
– Série B tome 1
– Série B tomes 2 à 6 et chronique globale de la série
– Série B, l’intégrale en deux volumes et l’épisode final Révérence
– épisode bonus audio Aenigma
– le retour de Stan Kurtz dans Nouvelle Donne
– Mister Iceberg
– Un banquet de squales