Quoi de plus noble que la chasse ? Y a-t-il activité qui permette davantage à l’être humain de s’accomplir ? L’art cynégétique ne représente-t-il pas par excellente la dualité et la contradiction humaines, entre pantalon vert olive assurant une fusion parfaite dans l’environnement et gilet orange inventé par ce maître du camouflage que fut André Bile, dit “Dédé” ?
Parce que c’est quoi, la chasse ? La communion de l’Homme avec la Nature. Le premier finit la journée avec de la boue plein les godasses tandis que la seconde se pare d’un chapelet de canettes vides, ornement précieux qu’elle conservera sur son sein terreux des dizaines d’années durant.
La chasse, c’est aussi ce rapport agonistique entre le règne humain et le règne animal. Antagonisme à armes presque égales, un peu bourru, certes, mais non dépourvu de cet esprit poétique si cher à Clint La Fontaine, sur l’air de “la raison du plus fort est toujours la meilleure quand on a un pistolet chargé, toi, tu creuses”.
La chasse, enfin, c’est cet esprit communautaire empreint d’une camaraderie avinée et consanguine. La nuit s’achève enfin dans le souffle des eaux1 que le petit groupe s’ébranle pour son épopée champêtre, la fleur au fusil, les sens étourdis par la lumière de l’aube naissante et le son jovial des blagues racistes. L’escouade est soudée, sauf Marcel qu’est un sale con, le gros Jeannot dont tu t’es tapé la femme, Bébert qui s’est tapé la tienne et Nanard qui tire toujours la gueule depuis que son fils Brandon s’est fait faucher par une volée de plomb à la dernière saison. La silhouette d’un lapin et d’un enfant se ressemblent tant qu’une erreur est vite arrivée. Qui amat periculum in illo peribit.
La chasse, c’est vraiment un truc de gros cons.
En chasse !
Jess Kaan
Lajouanie