François Theurel, j’ai déjà eu l’occasion d’en parler sur ce blog. Enfin, lui sans être lui, puisqu’il s’agissait de son alter ego Le Fossoyeur de Films.
En version courte, le bonhomme a une chaîne YouTube sur laquelle il parle de cinéma de genre. Si le cœur vous en dit, abonnez-vous pour aider la chaîne à sortir de sa (relative) confidentialité. Vous ne le regretterez pas, le contenu est bon de chez bon.
T’as vu le plan ?
100 plans cultes (ou pas) et ce qu’ils nous apprennent sur le cinéma
François Theurel
(aka Le Fossoyeur de Films)
Tana
Or donc le gars Theurel sort un bouquin. On ne dira pas pour autant qu’il s’est mis à l’écriture, puisqu’il ne fait que ça sur sa chaîne. Les chroniques sont un exercice d’écriture, quelle que soit leur forme. La remarque vaut pour le texte (genre ici on évite la tambouille générique) comme pour l’image (le FdF, on l’aura compris).
Quand le manieur de pelle avait annoncé qu’il préparait un livre, je m’étais dit “glop” (sens de la concision level 1000). Quand il a été question plus tard du contenu, la compilation de plans… Moins emballé, j’avoue. J’attendais… je ne sais pas… un ouvrage plus théorique, un recueil d’articles sur le cinéma (le de genre, les représentations, la construction/déconstruction d’une mythologie…). Bref, quelque chose de plus ambitieux qu’un top 100. Phrase qui risque de me faire passer pour un connard alors que c’est un compliment, hein. Le Fossoyeur envoie du lourd dans ses chroniques, j’imaginais un monument version papier. Au fond, on en revient à une question qu’il a abordée dans ses vidéos : les attentes, les fantasmes, les films – c’est dans le ton – qu’on se monte dans son coin.
On n’a pas toujours ce qu’on veut, chantait le philosophe britannique Mick Jagger.
Mais l’inattendu, ça peut être bien aussi.
J’ai acheté T’as vu le plan, je l’ai lu – ça aide pour en parler – et c’était bien.
Et frustrant aussi.
Évacuons la frustration. 200 et quelques pages, 100 plans, beaucoup de photos… reste peu de texte. Je suis la chaîne du Fossoyeur depuis ses débuts, j’ai l’habitude d’un propos long et détaillé. Là, pour le coup, le décalage de format est aussi frappant qu’un poltergeist.
Rien d’un défaut en soi.
Déjà parce qu’on est dans le pur subjectif, lié à mon parcours de spectateur. Sachant que l’ultime épisode des chroniques du FdF est pour bientôt, j’ai sans doute abordé le bouquin à l’envers. Comme une somme qui bouclerait la boucle, alors qu’il propose au contraire d’ouvrir des portes. La quatrième parle de “parcours totalement subjectif” à propos du cinéma, on peut en dire autant de l’expérience de lecture, propre à chacun.
Ensuite, parce que la frustration naît d’une envie d’en avoir plus. Si le bouquin avait été nase, d’envie il n’y aurait pas eu (à part celle de l’oublier), donc pas de frustration. CQFD.
Les gloutons dans mon genre pourront combler leur manque grâce à la chaîne, où la plupart des films présentés dans le bouquin sont soit chroniqués en tant que tels (Dune, Blade Runner, Aguirre…), soit évoqués à travers un format ou un autre (apartés, films à (re)découvrir, film wars). De quoi se mettre sous la dent à s’en décoller les plombages, suffit d’emprunter un des nombreux ponts qui relient le papier au oueb.
Parce qu’il est bien fichu, ce livre. Au fond, des fiches courtes, pour des plans, c’est raccord avec la notion d’instantané. L’essentiel est posé, les pistes lancées, avec ce qu’il faut de sérieux, de profondeur, d’accessibilité et de légèreté. Le format esquisse fonctionne.
Mention bien pour les encadrés sur les notions et techniques (travelling, quatrième mur, plan-séquence, slasher, nanar, etc.), qui permettront aux néophytes d’étoffer leur bagage cinématographique.
Tous les plans ne se déroulent pas sans accroc… Mention moins bien pour le correcteur qui n’a pas toujours été très attentif aux coquilles. Et là, je ne jette pas la pierre à l’auteur, à ce stade ce n’est plus lui le responsable des fautes.
Je n’ai pas non plus accroché au soulignement de bouts de phrases. Même principe que les rires enregistrés qui te prennent les zygomatiques par la main, des fois que tu serais trop bête pour comprendre tout seul quand il faut te marrer. Un lecteur est capable de faire le tri tout seul, a fortiori dans des textes aussi brefs où chaque mot a son importance.
Ces deux réserves formelles mises à part, le reste est propre niveau mise en page, chapitrage, iconographie. L’ensemble donne un beau bouquin (convertible en cale, dixit l’intro, mais je n’ai pas testé cette option) avec une sélection intéressante tant pour les plans que pour les films dont ils sont issus.
À l’arrivée, en mettant un doigt dans le culte, T’as vu le plan ? se pose comme un ouvrage sympa pour se lancer dans la grande aventure du cinéma.