Char iconique de la Seconde Guerre mondiale, même s’il n’en mérite pas tant, le Tigre a connu chez Cobi un paquet d’éditions dans à peu près toutes les couleurs possibles, du sable de l’Afrique au blanc neigeux du front russe, en passant par les bariolages à base de brun, kaki et vert pour être à la mode en demi-saison ou frimer l’été venu dans le bocage normand. Je l’ai en noir, enfin gris très, très foncé presque noir, dunkelgrau comme disent les Teutons.
Pas expert en camouflage de blindés, si j’ai bien compris ce que j’ai pu en lire ici et là, on est donc sur un des premiers modèles de l’imprononçable PzKpfw VI Ausf. E (peuzeukeufeu vi osef) avant que la couleur en sortie d’usine ne bascule sur quelque chose de plus discret. Parce que le noir, c’est classe et ça va avec tout, par contre pour un engin de cette taille, c’est pas la teinte opti tant dans le désert libyen qu’au milieu d’un champ de blé ukrainien ou des plaines enneigées de Russie. Bon, vu le blindage du machin, quasi impénétrable pour l’époque (fin 1942), ça gêne pas trop, tu t’en fous un peu d’être chopé dans la pampa et de te faire canarder, t’es invincible. Mais ça fait quand même pas très sérieux (surtout à partir de 1943, quand tu te retrouves face à un IS-2 capable de te fumer).
Donc perso, j’ai choisi la version gris foncé, parce qu’il n’y a pas d’IS-2 dans ma chambre, déjà, ça limite les risques de casse. Ensuite, parce que le catalogue de Cobi tourne et qu’à l’époque de l’achat, c’était ce modèle de Panzer VI qui était proposé (réf. 2538). Enfin, parce qu’il était pas cher (50 balles en novembre 2022).
À l’ouverture de l’emballage, comme toujours, on se dit qu’on a acheté pas mal de vide. La boîte étant remplie au deux tiers, elle pourrait donc être plus petite d’un quart sans tout tasser à mort. Un jour, faudra que les fabricants comprennent que les grosses boîtes, c’est beau de loin, ça permet faussement de justifier les tarifs toujours plus élevés, mais que pour l’expérience client, on atteint des sommets de contre-productivité. Tu ouvres, tu vois d’abord le vide, ta première impression est une déception. CQFD.
Sorti de son emballage trop grand, le matos semble déjà plus conséquent : trois gros sacs, numérotés de 1 à 3, contenant d’autres sachets pleins de briques pour un total de 800 (dixit la boîte, j’ai pas recompté une par une).
Les instructions sont claires avec le petit défaut récurrent chez Cobi qu’on place parfois les briques un tenon trop loin (à défaut d’un pont). M’enfin, on se corrige dès l’étape suivante, donc pas de souci majeur.
Trois grandes phases, une par sac de briques. Le montage a pris quelque chose comme deux heures, à vitesse pépère. Pour un Panzer, c’est bien, t’as pas l’impression de torcher le truc en deux temps trois mouvements et t’y passes pas non plus la journée.
À la différence de Lego qui utiliserait le double de pièces pour un engin identique en tout point et te le vendrait le triple du prix, Cobi ne gonfle pas l’inventaire à coups de pièces minuscules pour pouvoir dire “c’est cher, certes, mais y a plein de briques”. Ouais mais des micro briques de 1×1 par brouettes, qui coûtent 2 ou 3 centimes et te sont facturées 15, ça va bien maintenant. Parlons pas des astuces de margoulins consistant à fractionner une pièce d’un seul tenant pour doper artificiellement le compteur (i.e. deux tiles 1×3 bout à bout quand le modèle 1×6 existe pourtant dans la même teinte et aboutirait au même résultat…). Donc ici, en majorité des pièces de taille moyenne, quelques grosses et un peu de petites. Et ça fait le taf nickel, grâce à une méthode de construction à la fois simple, efficace et astucieuse.
Autre avantage de Cobi sur Lego, les pièces à motif sont tampographiées. Parce que les Danois, ils sont gentils, mais voilà des années qu’on leur dit que les stickers, c’est de la daube qui supporte mal la manipulation, le jeu, l’exposition, la poussière, l’humidité, la chaleur, la lumière, plus des problèmes de différences de teinte entre les couleurs de fond des stickers et celles des briques, et encore en plus la difficulté à en coller certains (genre les autocollants 1×1, merci l’idée de con)… et ils s’obstinent à continuer dans cette voie. Comme dirait Obélix, “ils sont fous, ces Vikings”. “Je vous demande de vous arrêter”, ajouterait Balladur’s Gate.
Pour dire à quel point la haine des stickers Lego atteint un niveau olympique, l’absence d’autocollants est un des arguments de vente de Cobi. La boîte comporte un macaron Pad printed, no stickers.
Au terme du montage, on obtient un beau bestiau. Normal, c’est un tigre, pas un chaton. Longueur de 21 cm pour la caisse, 30 cm jusqu’au bout du canon, 13 cm de large, 11 cm de haut, c’est le bel engin.
À titre de comparaison avec un Panther (MOC Lego), un Renault R-35 (Cobi) et un Sd.Kfz. 251 (MOC Lego) :
Petits regrets : la pelle à l’avant, bof, elle est un chouia trop grosse et se retrouve dans l’axe de la mitrailleuse ; les mitrailleuses, justement, un Tigre en embarque deux – c’est même marqué sur la boîte dans le cartouche d’infos techniques –, une seule est montée en façade mais pas celle de la tourelle (que j’ajouterai en piochant dans mon stock de pièces) ; une seule figurine, c’est un peu juste et, sans aller jusqu’à fournir un équipage complet de cinq tankistes, un deuxième bonhomme aurait été bienvenu.
On parle ici de petites réserves, à la limite du pinaillage, pour que le modèle soit parfait. Mais sinon, je suis très satisfait du résultat : un bon gros engin conforme à son modèle, avec une expérience de montage sympa et pour un prix correct, j’en ai eu pour mon argent. Aucun vrai regret dans l’opération.
Le blindé est à la hauteur de sa réputation : solide. Des gamins peuvent jouer avec sans souci, il est à peu près aussi indestructible qu’un vrai. Pour les fonctionnalités de jeu : les chenilles moulinent au poil de fion, la tourelle tourne (ce qui n’a rien d’extravagant, c’est conçu pour), deux écoutilles s’ouvrent sur le bas de caisse à l’avant, deux autres sur la tourelle, ainsi qu’un capot à l’arrière pour voir le moteur (et faire des jeux de mots sur une vieille pub d’Esso où il était question de mettre un tigre dans son moteur), le canon et la mitrailleuse sont inclinables. Donc rien de foufou, mais bon, c’est un char d’assaut, pas un Transformer, on n’en attend pas plus.
Pour l’exposition, rien à redire non plus, Tigrou en impose sur une étagère, identifiable au premier coup d’œil sans avoir besoin de lire son nom sur la briquette qui l’accompagne. Sa silhouette caractéristique est très bien rendue et on ne risque pas de confondre ce Tigre avec son homonyme Clemenceau, qui porte une moustache alors que les Panzer non.
De tous les Tigre I sortis par Cobi, je pense que c’est celui qui présente le rapport qualité-prix le plus avantageux. Bien foutu et vraiment pas cher. Les trois modèles actuels du catalogue – 2586 en camouflage noir-blanc du front russe, 2587 pour le char de Wittman en camo Normandie et 2588 pour l’exemplaire du musée de Bovington – proposent en plus une tourelle amovible avec un intérieur de char plus détaillé, pour un inventaire de briques une fois et demi plus fourni… mais pour un prix multiplié par deux (1330 pièces, 125€ pour le 2586 ; 1200 pièces 90-100€ pour le 2587, 1275 pièces, 95€ pour le 2588). Le peu de changements sur la partie visible de l’engin ne me semble pas justifier un tel écart de tarif pour rendre l’investissement intéressant.
Je me dis que j’ai acheté le mien au bon moment…