Comme Ninja Assassin avec lequel il est souvent confondu, Ninja tout court date de 2009 et a été produit par Nu Image.
Avant de partir dans le festival du loufoque, et tant qu’à faire œuvre d’utilité, commençons par un petit exposé pour la culture générale (version plus complète dans le dossier de la honte).
Le ninja dans la vraie vie de l’IRL
À l’origine, on parle d’un shinobi (“celui qui est caché”), le terme ninja est plus récent (1780 environ). Il désigne un guerrier-espion-assassin. L’image de l’acrobate en pyjama noir vient surtout du cinéma, de la télé et des BD, mais ses racines plongent au XIXe (théâtre).
La légende et le secret n’aident pas à déterminer avec exactitude l’origine des ninjas. Il s’agit probablement de milices civiles des provinces d’Iga et de Kōga. Ces miliciens auraient créé leur propre style de combat en amalgamant des techniques d’horizons variés. Leurs spécialités touchent d’abord à l’embuscade, la guérilla, le renseignement, bref tout ce que les samouraïs ne peuvent pas faire puisque contraire au Bushido et aux valeurs nobles de gens censés se trucider proprement entre eux. Leur âge d’or va du XVe au XVIIe siècle, grande époque de guerres féodales. À partir du XVIIe avec le relatif calme de l’ère Edo, employés à l’unité, ils continuent à servir d’espions, d’assassins ou de gardes du corps.
Côté technique, leurs compétences se basent sur la discrétion et le camouflage, ainsi qu’une palette martiale fournie (pratique de l’arc, du sabre et de la lance pour les classiques, plus tout un tas d’armes moins orthodoxes incluant le poison).
La liste des armes utilisées par les ninjas est aussi épaisse qu’un bottin, j’en citerais quelques-unes parmi les principales : wakizashi (sabre plus court que le katana et plus pratique dans les endroits exigus), saï (dague dont les branches de la garde servent à bloquer voire casser les sabres), shuriken (les fameuses étoiles qui en ont d’ailleurs rarement la forme), kusarigama (faucille reliée à une chaîne), etc. On notera que beaucoup de ces armes sont conçues pour affronter les samouraïs, tout simplement parce que ce sont les seuls adversaires valables et redoutables à l’époque. D’ailleurs, à niveau égal en terrain découvert, le samouraï met la pâtée au ninja.
Le ninja au cinéma
La silhouette vêtue de noir est popularisée par le kabuki, relayé par les romans, puis la BD, le ciné, la TV et les jeux vidéo. Figure récurrente de la culture japonaise, il apparaît dans le cinéma occidental à partir des années 60 via On ne vit que deux fois. L’exportation du cinéma asiatique à partir des années 70 le fera connaître à grande échelle.
On aurait pu avoir des films sympas et quelques héros mythiques, à mi-chemin entre James Bond (dont certains gadgets sont proches de l’outillage et de l’esprit ninja), Leon et Ghost Dog… Mais qui dit thème populaire, dit récupération. Les années 80 abonderont en films de ninja, faisant perdre toute crédibilité à une figure pourtant intéressante de guerrier de l’ombre. Aujourd’hui, on peut encore faire des films sérieux sur des espions ou des tueurs à gages, ce que sont les ninjas, mais prononcez le mot et tout le monde se marre en pensant à un “tueur à gags”, genre de bouffon épileptique en pyjama. À trop en faire dans le n’importe quoi, le ninja a vite atterri dans les séries B puis Z, donnant naissance à quantité de nanars. Les responsables sont à chercher du côté de Menahem Golan et Godfrey Ho.
Et donc, ce film Ninja ?
Comme toujours après avoir vu un film de ninja, je n’ai pas la réponse à cette question fondamentale. Dans les affrontements de groupe, quand le héros se bat contre quinze bonshommes, pourquoi y en a-t-il un seul qui attaque et quatorze qui pirouettent comme des débiles dans le fond au lieu de le noyer sous le nombre ?
Bref.
Exception faite de l’affrontement final et de sa débauche d’armes ninja (dix armes différentes utilisées !), il est assez peu question de ninja dans ce film malgré un titre qui ne laisse planer aucune ambiguïté.
Gros (et seul) point fort, les scènes d’action sont bien faites. La mise en scène évite les effets de caméra parkinsonienne et les ralentis-accélérés, mais se rattrape sur les bruitages débiles à outrance.
Le reste est une série B, truffée d’éléments nanardisants, qui peut divertir pour mettre le cerveau en pause après une journée crevante. Secte de pacotille, personnages de caricature, dialogues patauds, scénario squelettique et prévisible, décors new-yorkais fauchés. Scott Adkins sait se battre, mais c’est tout : dès qu’il s’agit d’interpréter quelque chose, y a plus personne.
Rien de révolutionnaire par rapport aux action movies JCVD style des années 80-90. Il y a trente ans, Van Damme dans le même film, ça passait comme une lettre à la poste… on voit ce qu’il en est aujourd’hui.
Plutôt qu’une longue critique textuelle détaillée du film, je vais laisser parler la boîte à images à travers quelques captures maison.