Univers SimulacreS

Numéros hors-série magazine Casus Belli

En 1988, le premier numéro hors-série du magazine Casus Belli proposait rien de moins qu’un système générique complet de jeu de rôle : SimulacreS. En 1994, le HS n°10 remettait le couvert avec une édition mise à jour.
Plusieurs univers de jeu sont venus étoffer le titre, certains publiés comme des suppléments traditionnels de JdR, d’autres comme hors-série de Casus, parfois les deux.
Capitaine Vaudou : aventures de pirates dans les Caraïbes au XVIIe siècle ;
Cyber Age au titre explicite sur son ambiance cyberpunk ;
SangDragon : médiéval-fantastique classique ;
Aventures Extraordinaires & Machinations Infernales : de l’action et des complots dans la seconde moitié du XIXe siècle.
On s’intéressera ici aux trois derniers titres, le reste ayant été couvert dans les articles en lien.

Simulacres SangDragon Casus Belli hors-série 11

SangDragon

SimulacreS se veut un jeu accessible aux débutants, aux règles simples et au prix réduit. À partir de là, proposer un univers heroic fantasy, soit le contexte le plus susceptible de séduire des néophytes parce que le plus connu, coulait de source. Tout en étant casse-gueule. Déjà, il existait une concurrence pléthorique dans ce genre qui devait représenter les trois quarts de la production rolistique à l’époque. Va sortir ton épingle du jeu… Ensuite, l’inconvénient de l’ultraclassicisme, c’est d’être déjà vu et revu. SangDragon n’apporte rien de neuf au corpus. Enfin, même avec un copieux numéro de 100 pages, beaucoup pour un magazine, peu pour un JdR, chaque chapitre sera bref, un simple survol. Autant dire que si les joueurs sont débutants, le maître de jeu, lui, a intérêt à être rodé pour pouvoir développer l’univers esquissé dans SangDragon.
Alors, l’ensemble est bien fichu. Là-dessus, l’équipe de Casus a fait le taf. On trouve tout ce qu’on est en droit d’attendre : les règles, la magie, le bestiaire, un petit coin d’univers avec sa géographie et son organisation sociale, un scénario pour mettre le tout en pratique. Si vous voulez faire découvrir le JdR à vos ados ou à vos potes, pour se lancer, SangDragon assure très bien le taf. Pas trop ingurgiter pour eux comme pour vous.
Il n’en reste pas moins que ce choix du médiéval-fantastique m’avait pas mal déçu à l’époque. Sur le même créneau, en simple et pas cher, on avait déjà Les Terres de Légende et L’Œil Noir. En simple mais dans la gamme de prix au-dessus, la deuxième édition d’AD&D venait de sortir en VF. Une foule d’autres jeux existaient, des faciles, des compliqués, des pas chers, des hors de prix, des univers classiques aux plus improbables, sur tous les tons de l’épique au comique. Un de plus, pourquoi quand tant d’autres thèmes brillaient par leur absence ? En français, on manquait d’un jeu aventure-SF-fantasy, mélange d’Indiana Jones, de Rocketeer et de vieux films de la Hammer. Ou d’un jeu orientée action décontractée, quelque part entre L’Agence Tous Risques et James Bond. Alors que le premier hors-série SimulacreS évoquait ces deux thèmes et que le second (HS10) reprenait à son tour l’idée des séries TV.
Enfin bon, classique mais bien fichu, ou bien fichu mais classique, à défaut d’originalité, SangDragon ne manque pas de qualités.

Simulacres Cyber Age Casus Belli hors-série 16

Cyber Age

Même remarque que SangDragon, en moins prononcée, mais tout de même. Si les jeux inscrits dans le courant cyberpunk ne se comptaient par milliers à l’époque, il en existait déjà assez pour s’interroger sur la nécessité de sortir une version de SimulacreS sur le sujet quand tant d’autres thèmes peu traités auraient mérité d’être couverts (comme la piraterie dans Capitaine Vaudou). Cyberpunk bien sûr, Shadowrun et Berlin XVIII, on avait déjà de quoi faire, traduit (pour les deux premiers) ou en VF native (le dernier). On n’avait pas douze mille références non plus à se mettre sous la dent, donc un cyber monde complet à moins de cinquante balles de l’époque, ça valait quand même le coup. Plus accessible que Shadowrun et ses règles velues, moins coûteux que Cyberpunk et sa foule de suppléments, moins restrictif que Berlin XVIII quant aux classes de personnages.
Si le jeu n’apporte pas grand-chose par rapport à ce qui existait déjà en JdR, romans, films et BD sur le sujet, il représente une bonne synthèse de la somme de ses inspirations. On se situe sur un des meilleurs suppléments pour SimulacreS, qui reste simple à jouer même avec les règles additionnelles propres à cet environnement, là où d’autres jeux deviennent ultra complexes quand il s’agit de gérer les voyages dans la Matrice. Pas convaincu tout de même par le versant “magie” qui fait lorgner Cyber Age du côté de Shadowrun tout en recyclant le vaudou du Capitaine éponyme. C’est de trop à mon sens, ou pas assez développé, pour trouver sa place en l’état. Mis à part ce point de détail, tout le reste est au top.

Simulacres Aventures Extraordinaires Machinations Infernales Tristan Lhomme Casus Belli

Aventures Extraordinaires
& Machinations Infernales

Des aventures dans un monde à la Jules Verne, c’était le projet. Une plongée dans la seconde moitié du XIXe siècle, période très peu couverte par les jeux de l’époque, alors qu’il s’agit du cadre de jeu le plus riche qu’on puisse imaginer. Une ère de bouleversements technologiques et sociétaux comme on en voit rarement dans l’Histoire (voire jamais, c’est un cas unique).
Au niveau des règles, peu de choses. Une poignée de personnages pré-tirés, un scénar et quelques éléments spécifiques à cette époque (professions et compétences). Le reste brosse surtout le portrait de l’époque et aborde les possibilités d’aventures.
Elles sont légion entre 1850 et 1880. L’Afrique est encore inexplorée (Cinq semaines en ballon), l’Asie intrigue et attire, le Grand Ouest américain ouvre grand les bras. Du côté de la vieille Europe, les tensions diplomatiques sont nombreuses entre États, le printemps des peuples de 1848 est encore frais, l’Italie est en cours d’unification. À l’intérieur des frontières françaises, on oscille entre république, Empire 2 le retour, velléités de restauration monarchique, révolution en rouge et noir, agitation anarchiste. Les nouveautés de la technologie offrent une foule de thèmes de scénar (comme celles de la Belle Époque alimenteront les enquêtes des Brigades du Tigre), qu’on veuille rester dans les clous de la science ou s’aventurer vers le steampunk et l’anticipation à la Jules Verne (Vingt mille lieues sous les mers). On peut même glisser vers un fantastique de bon aloi en ces temps de littérature gothique et de vogue du spiritisme.
Tout est jouable sur cette période ! Historique, aventure, steampunk, fantastique, enquête, diplomatie internationale, politique intérieure, exploration, western, on a l’embarras du choix.
Et c’est là que je regrette de ne pas y avoir joué à l’époque. J’ai pu le feuilleter récemment et là, il a pris un petit coup de vieux (la vision du Second Empire reste très old school, pour ainsi dire issue de la IIIe République qui lui a forgé une légende noire, que les historiens ont beaucoup nuancé depuis). Aujourd’hui, ce supplément demanderait à être étoffé, il n’en reste pas moins une bonne mine d’infos et d’idées, soit un socle solide sur lequel on greffera ses propres développements.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *