Conseils pour lancer son blog (4)
Le concept et la ligne éditoriale
Maintenant que les bases sont posées, si tu as toujours envie de tenter l’aventure, on attaque la conception du blog proprement dite.
Premières choses à définir, le concept et la ligne éditoriale. Il s’agit de la partie la plus importante du blog, celle qui conditionne toute la suite. L’identité de ton blog repose là-dessus, va donc falloir te creuser les méninges.
Plutôt que de me lancer dans de longues définitions abstraites, je vais prendre un exemple connu : le Fossoyeur de Films. Je sais, chaîne YouTube de cinéma, hors sujet par rapport aux blogs littéraires gnagnagni gnagnagna… ou pas. Beaucoup de choses dans ma démarche s’inspirent autant de la blogosphère que de la… euh… vidéastosphère (?).
Donc le Fossoyeur de Films, pour faire simple, sa ligne éditoriale, c’est le cinéma de genre ; son concept, c’est le personnage du fossoyeur.
En gros, de quoi tu vas parler et comment tu vas en parler.
Je me répète, mais c’est hyper important, tout le contenu de ton blog en découlera.
Première question, seras-tu généraliste ou spécialiste ? Parler d’un peu tout, se concentrer sur un genre (roman, nouvelle, théâtre, poésie, BD, manga…) ou un genre puisque tout s’appelle genre (policier, romance, SF, fantastique…), un pays, une période, un courant, un thème, un public précis (jeunesse, étudiants/universitaires, LGBT, expats…). Les possibilités sont légion et les combinaisons infinies.
Inutile de préciser que plus ta niche est pointue, plus le public que tu toucheras sera restreint. Un blog sur la littérature italienne du XVe siècle n’attirera pas une foule de lecteurs… mais te donnera l’occasion de rencontrer des spécialistes du sujet, passionnés à mort comme toi.
Tout choix a ses avantages et inconvénients, il n’y en a pas de bon ou de mauvais en soi, c’est le tien. Après, rien n’est gravé dans le marbre, tu peux évoluer dans tes goûts ou ton propos, élargir ou restreindre ton champ.
Ensuite, quelle forme vas-tu adopter ? L’avis (j’aime/j’aime pas), la critique (livre bon/mauvais) ou la chronique (terme nébuleux qui couvre les deux précédents assaisonnés de tout ce qu’on veut y mettre). Est-ce que tu pars sur des textes courts ou longs ? Sur de l’analyse pointue ou un panorama plus général ? Sur du style universitaire, littéraire, oral ? Le ton sera-t-il sérieux, décalé, humoristique ? L’humour fait vendre, certes, mais est-ce que c’est ton truc ? T’exprimeras-tu en tant que toi ou par le biais d’un personnage que tu auras inventé ? Les possibilités sont légion et les combinaisons infinies (bis).
L’idée n’est pas de pondre un cadre trop rigide qui deviendrait vite un carcan, mais d’avoir des lignes directrices pour éviter de partir dans tous les sens. Là, pareil, tes choix t’appartiennent et peuvent évoluer en cours de route.
Enfin, que vas-tu apporter par rapport aux autres blogs ? Quelle sera ta plus-value ? Dans l’absolu, on peut faire sans et se contenter de donner son avis. Suffit de voir à quel point la blogosphère est surchargée de clones (idem les booktubes) pour se rendre compte que l’ambition (ou la prétention) de vouloir apposer sa touche personnelle s’efface souvent derrière le formatage. Les deux optiques ont leur défaut : un énième blog lambda sera noyé dans la masse des copier/coller, un blog qui cherche à se démarquer pourra ne pas plaire selon les partis-pris éditoriaux. Les deux peuvent aussi fonctionner pour les mêmes raisons.
Après, la plus-value reste, comme son nom l’indique, un plus. On peut très bien ne proposer qu’un format standard sans pouet-pouet à côté. Dans ce cas, tu as intérêt à bétonner tes chroniques à mort.
Si je dois résumer : mets sur ton blog ce que toi tu attends d’un blog. Faut que ça te plaise à la base, que ce soit toi. Et n’hésite pas à évoluer quand le besoin (ou l’envie) s’en fait sentir.
Illustrons avec Un K à part.
Au début, je pensais m’orienter sur la littérature dite de l’imaginaire (science-fiction, fantastique, fantasy). Finalement, j’ai élargi à tout. Comme ça, je peux parler de tout. Logique imparable.
Je me connais assez pour savoir que j’aurais fini tôt ou tard par sortir de mon cadre, moitié parce que j’adore des bouquins d’autres genres (polar, histoire, cul, essais…), moitié parce que je finis toujours par me sentir à l’étroit et m’ennuyer dans un champ restreint.
Pour le format, j’ai choisi la chronique, propice à tous les délires. Longue, parce que j’aime bien passer en revue pas mal d’aspects d’une œuvre, sans parler des vannes et des digressions qui rallongent d’autant le texte. Les vannes, justement, sont un choix personnel, dans le sens où l’humour que je glisse dans mes chroniques reflète ma personnalité. J’aime bien déconner IRL. Rien à voir avec la dictature de l’humour en mode “je mets des blagues parce que ça fait vendre”. Je suis comme ça en vrai aussi (saoulant, donc).
Je n’ai rien inventé sur ce blog. Les chroniques existaient avant moi, les humoristiques, les analytiques, les un peu des deux, et cetera et cetera et cetera. Cela dit, je n’avais jamais trouvé LE blog où je me sente comme chez moi. Comme beaucoup de choses sur le Net, Un K à part est né d’une sensation de manque. Il existe d’excellents blogs littéraires – je ferai une liste un de ces quatre –, pourtant je restais toujours sur du “oui mais…”. Quant au tout-venant, j’étais gavé de lire et relire trop souvent les mêmes articles en deux parties : grand un, un résumé de l’histoire sans intérêt puisqu’il paraphrase la quatrième ; grand deux, avis rapide et creux “j’ai aimé parce que j’ai aimé” bourré de lieux communs (quand chaque bouquin est un coup de cœur slash pépite slash OVNI slash page-turner slash pouet, le superlatif ne rime plus à rien). Le tout en dix lignes pompeusement baptisées “chronique”. Facepalm.
L’idée n’était pas de faire mieux, genre quelle bande de branques, je suis bien au-dessus. Non, l’idée était de pondre mon truc à moi, qui me plaise, où je m’éclate, qui change… en espérant si possible que ça plaise à d’autres. Le même principe que j’évoquais à propos de certains booktubes que j’apprécie, parce qu’ils ne ressemblent à aucun autre (et qui sont partis de la même idée “concept qui me plaît et qui ne soit pas une énième copie de l’existant”).
D’après les retours que j’ai eus de lecteurs et lectrices assidus du blog, faut croire que cette politique éditoriale est un choix qui se défend. L’expression qui revient le plus souvent est “ça change”. Tant mieux, c’était l’idée.
J’aurais pu accoucher d’un blog lambda qui aurait suivi son bonhomme de chemin. Il n’aurait pas duré longtemps, parce qu’il ne m’aurait pas plu. Là, je m’éclate, parfait. Si des gens trouvent leur compte sur Un K à part, tant mieux, c’est fait pour. Quant aux autres, Internet est assez vaste pour abriter quelque part un site qui leur conviendra mieux.
Depuis le lancement, j’ai intégré des évolutions sur des détails ou de menus changements de contenu (les rubriques critiques express et interviews n’étaient pas prévues au départ). Les détournements sont un exemple de plus-value : tant qu’à savoir se servir de Photoshop, autant le mettre à profit (d’où l’importance de l’inventaire des outils, cf. chapitre 2). La ligne éditoriale globale, elle, n’a pas varié sur le fond. Pour le moment, elle se confond avec le concept pour former un tout, mais j’ai quelques projets en tête pour dissocier les deux…
Bref, l’idée n’est pas de tourner en rond avec la même recette ni de changer juste pour changer, mais d’avancer en fonctions des envies, des besoins, des idées (cf. Le Fossoyeur de Films et What the cut qui sont deux très bonnes écoles de remise en question).
0) Préambule
1) Pourquoi un blog ?
2) Les outils
3) Les contraintes
4) Le concept et la ligne éditoriale
5) La structure
6) Un nom qui claque
7) Le choix dans la date
8) La plateforme et l’hébergement
9) Le mail et le contact
10) Un design qui pète (mais pas trop)
11) Les publications
12) Améliorer son référencement
13) Travailler ses réseaux
14) Gagner de l’argent ?
15) Le service presse (SP)
C’est vrai qu’un petit truc pour sortir du lot est un plus. Je suis épatée par ces gens justement qui ont ce petit grain particulier. Je me reproche souvent d’ailleurs d’être dans un moule et ne n’avoir aucun talent pour en sortir, d’où les nombreuses remises en question sur l’existence du blog, qui a tendance à trop ressembler aux autres, mais bon…
Ta réflexion est encore une nouvelle fois juste, intelligente et percutante. Très bonne idée ces articles pour les « nouveaux » ! 🙂
Je ne sais pas si c’est une question de “talent”. Si je prends mes détournements, c’est surtout de l’imagination et de l’humour, donc rien d’extraordinaire, ce sont quand même des traits très courants. Et Photoshop, c’est une compétence apprise. Après le petit grain particulier… il y a peut-être une part de “on l’a ou on ne l’a pas”, mais c’est aussi quelque chose qui se cultive et s’entretient, donc pas non plus un genre de génie inné.
Niveau remises en question, j’ai ce qu’il faut aussi. Les “pourquoi je me suis embarqué là-dedans”, “pourquoi je me suis compliqué la vie”…
C’est tout à fait ça, on l’a ou on ne l’a pas…