Retour aujourd’hui sur trois modèles de mon enfance pour un article dédié à la guerre de siège sauce Lego : la catapulte des Faucons Noirs (Black Falcons Catpult n°6030 de 1984), la double catapulte des Chevaliers du Lion (Twin Arm Launcher n°6039 de 1988) et la tour de siège de cette même faction (Siege tower n°6061 de 1984).
J’ai toujours été fasciné par la guerre de siège. D’où vient cette passion ? Peut-être parce que mon premier contact avec la chose militaire a été cette forme spécifique de guerre, via la lecture des Plus belles histoires de la mythologie où un long chapitre était dédié au siège de Troie par les Grecs. Mon autisme a dû jouer aussi, parce que quand tu te sens en permanence agressé par le monde extérieur (le bruit, la lumière, les mouvements, les gens…), tu te retrouves mentalement en état de siège constant et tu es toujours sur la défensive.
Ce qui est sûr, c’est que le sujet me passionne et se ressent sur mes centres d’intérêt. À l’époque où je pratiquais le wargame avec figurines Warhammer Battle, mon armée préférée était celle des nains, capable de faire tomber n’importe quelle muraille avec son artillerie pléthorique et dont l’infanterie peu mobile mais inébranlable et bardée d’acier devenait elle-même un rempart en défense. Pendant la grande époque des jeux en Flash, j’ai pratiqué tous les tower defense possibles et imaginables. À la fac, Recherches de poliorcétique d’Yvon Garlan a été un de mes livres de chevet. Chaque fois que quelqu’un me demande de résoudre un problème, la solution que je propose implique à un moment ou un autre l’emploi d’une catapulte (ou d’un lance-flammes, qui reste dans le ton, cette arme étant redoutable contre les bunkers). J’emploie dans la conversation courante des termes du style “pétrobole” ou “oxybèle” comme si c’était la chose la plus naturelle du monde. Et cætera, et cætera, cet amour du rempart et du bélier, de la tour et du canon ne s’est jamais démenti.
Et sur le sujet, la gamme Castle m’a gâté pendant mon enfance.
Lego a sorti dans les années 80-90 une flopée de boîtes contenant des armes de siège : bélier (n°1971), tour roulante (n°6061), combinaison des deux (n°6062), baliste (n°6012), une chiée de catapultes de toutes les tailles (1480, 1491, 1917, 2890, 6027, 6030, 6032, 6039), liste non exhaustive…
Bon alors sur un plan technique, la plupart de ces engins atteignent un degré zéro de réalisme. Les catapultes Lego n’en sont pas, faute de disposer d’un système de torsion. Elles se rapprocheraient plutôt du trébuchet… sauf qu’elles n’ont pas non plus de contrepoids. Donc pour la précision historique de la reconstitution, passez votre chemin (ou bidouillez vos propres engins d’après les modèles connus de l’Antiquité et du Moyen Âge). Après, pour un gamin, la crédibilité n’est pas le critère premier attendu : du moment qu’on peut balancer des trucs avec, on est content. Je rappelle qu’on parle d’une époque où Lego fabriquait des jouets pour que les enfants s’amusent.
En dressant l’inventaire de mes briquettes, je me suis rendu compte que je disposais d’un joli petit arsenal de cuillères de catapultes. Deux modèles ont retenu mon attention en me rappelant le souvenir de mes boîtes de jadis. Je me suis donc lancé dans la reconstitution de ces sets antédiluviens. Petit challenge, hein, les instructions se trouvent sans peine sur le Net et les briques sont pour la plupart très basiques et toujours fabriquées. Les pièces, je les avais toutes en stock, donc no problemo mais au pire, celles qui ne sont plus commercialisées se remplacent sans difficulté (i.e sur le set 6030, pour la pièce 4597 qui sert de socle, une plate 6×8 et deux briques 1×4 font l’affaire, et pour la cuillère, on peut mettre une pelle de pelleteuse City à la place).
Catapult (6030)
Or donc, sorti en 1984, le set Catapult contient – attention scoop ! – une catapulte. Bon en vrai, le corps se rapproche plutôt d’un trébuchet, la cuillère d’une pelleteuse, il n’y a aucun système de torsion ni de contrepoids et on se demande comment les soldats la rechargent vu qu’à échelle humaine le bras reste bloqué à 4 mètres de haut… Donc on part plutôt sur l’idée d’une catapulte (ou à la limite un genre de trébuchet à traction). Cette petite boîte de 75 pièces inclut deux personnages de la faction des Black Falcons, donc là aussi assez loin des réalités pratiques, la plupart des machines de siège conçus pour balancer de la caillasse nécessitant au moins une dizaine de servants. Quant à la couleur, si elle rend l’apparence de l’engin plus terrible et colle avec le nom des Faucons noirs, elle ne reflète que l’absence au catalogue Lego de briques marron pour rendre la teinte du bois, un ton rare à l’époque de ce set et utilisé surtout pour les accessoires (arcs, lances, tonneaux, coffres, roues de charrette…).
Mais fi des considérations historiques, c’est une arme qui m’a bien plu quand j’étais petit. Imposante à l’échelle des minifigs, fonctionnelle (on peut balancer une brique à 1,50 mètre de distance), à roulettes mobiles (cf. épisode “L’étudiant” de Kaamelott), deux soldats en prime. Tout ce qu’il fallait pour s’amuser.
Aujourd’hui, on peut trouver ce set neuf à 350€, tarif qui relève du parfait délire pour si peu de pièces et de personnages. Surtout pour un modèle très facile à reproduire. J’en ai vu tourner pas mal d’occase à 20-30€, c’est déjà plus correct.
Une fois ma reconstitution achevée, je me suis demandé si je n’allais pas changer les roues Technic d’origine pour des roues à rayons plus en phase avec un engin médiéval. J’ai testé, le résultat est plus joli… et j’ai remis les roues d’origine. Pas que je sois un intégriste des constructions originales à la brique près, juste que pour ce modèle, je trouvais plus fun de conserver la version de mon enfance.
Trouvant la cuillère petite, pour déconner, j’ai essayé avec quelque chose de plus sérieux. J’ai peut-être vu un peu grand…
Autre bidouillage, cette fois pour profiter que le corps de l’engin est creux, l’ajout d’un bélier. Tant qu’à avoir des pleines poignées de pièces Technic inutilisées, autant qu’elles servent. Résultat : une poutre qu’on peut faire aller d’avant en arrière pour défoncer la porte d’un château.
C’est pas avec un bidule pareil que je remporterai un concours de MOC, mais comme j’ai toujours pensé que l’esprit de compétition était de la merde en barre, je ne fais pas de concours de MOC, donc je m’en bats les noix (à coups de bélier, donc, c’est dire si j’ai confiance en la solidité de mes joyeuses).
Twin arm launcher (6039)
On passe à l’autre faction, celle des Chevaliers du Lion, pourvue d’une catapulte à double foyer. Un petit set de 1988 et d’une soixantaine de pièces, deux bonshommes, ça faisait le taf à l’époque pour satisfaire mon frangin et moi.
La reconstitution se limitera ici à l’engin, faute des pièces nécessaires pour les personnages. L’engin n’a rien de bien impressionnant par la taille, plutôt réduite, mais se rattrape par sa capacité à balancer deux projectiles. Seul défaut, les roues avant bloquent le mouvement de balancier lors du tir, il est donc préférable d’ajouter une hauteur de brique à la construction pour gagner en amplitude.
Les roues et les bras des catapultes, cuillères comprises, représentent la seule difficulté. Problème de taille quand même pour une catapulte montée sur roues qui risque de se limiter à un affût fixe et vide si vous ne disposez pas de ces pièces, plus commercialisées depuis une vingtaine d’années (mais faciles à dénicher sur Bricklink). Là encore, l’ensemble des briques se trouvait dans mon stock, donc facile de remonter l’engin.
Pas grand-chose à dire de plus sur cette petite machine, simple voire simpliste, dont l’avant du tronc central aurait gagné à être davantage travaillé, plutôt que meublé avec un bête tonneau dont on ne sait pas trop ce qu’il vient faire là. Le vide à l’arrière gêne moins, puisqu’il est censé servir au stockage des munitions. ‘Fin bon, ce set faisait partie des boîtes pas chères de la gamme, du genre que les parents achètent facilement à leur gamin. L’appât qui menait à terme à l’achat de boîtes plus grosses, jusqu’à l’acquisition d’un château. L’engrenage classique…
En tout cas, petit plaisir bienvenu de ressusciter cette double catapulte de mes vertes années.
La tour de siège (6061)
À l’origine, cette boîte contient une tour de siège (d’où le nom de la boîte), trois fantassins, un cavalier, une échelle et une petite section de muraille. Soit un ensemble à la fois schématique et complet. Le bout de mur pouvait être associé à d’autres constructions comme le château des Lions (6080) et la forge (6040) grâce à un système de briques à trous et de pins Technic, le tout permettant de monter des forteresses de belle envergure.
Cette boîte, on l’avait eue en double avec mon frangin, ma mère achetant parfois des sets en oubliant qu’on les avait déjà. Que ça fasse doublon, on s’en foutait, on était fans des Castle, donc on trouvait toujours à tout utiliser, soit en l’état avec chacun le sien, soit en recyclant les briques d’un des sets dans des constructions maison. Les tours d’assaut nous ont beaucoup servi au cours de moult bastons
Ces deux tours sans lien de parenté avec celles de Tolkien sont les seules rescapées de ma collection Lego de l’époque. J’ai toujours les échelles aussi. Tel un Indiana Jones furetant dans un temple paumé au milieu de la pampa, j’ai redécouvert ces antiquités dans la cave parentale. Vu les différences ici et là entre les deux engins, y a eu de la bidouille a long time ago (y a eu pas mal de poussière aussi en presque quarante ans, faudra que je les relave…). À voir la conformité avec les modèles d’origine… Je garderai une version alternative, histoire d’apporter un peu de variété. Deux engins identiques donneraient trop l’impression anachronique d’avoir été usinés en série sur une chaîne de montage. L’étage inférieur étant creux, on peut y caser un bélier maousse, ce serait dommage de s’en priver.
La lyre d’Alexandre (MOC à deux ronds)
Comme il me restait des cuillères de catapulte inutilisées et que j’avais la flemme de bricoler une machine spécifique pour chacune, à problème simple solution simpliste, j’ai tout casé sur le même engin.
Or donc les Russes avaient l’orgue de Staline, désormais les Grecs auront eux aussi leur katioucha, avec la bénédiction d’Athéna, sainte patronne des artilleurs et balistaires.
Voici la lyre d’Alexandre.
Je vous raconte pas la mélodie…