On ne le dira jamais assez : les salons du livre, c’est le bien. L’occasion de retrouver les têtes connues et aussi de découvrir des auteurs pour élargir ses horizons de lecture. Ç’avait été le cas aux dernières Halliennales avec Olivia Lapilus et son Voyageur Bleu.
Le Voyageur Bleu
T.1 Prophétie
Olivia Lapilus
Anyway Éditions
Quatrième de couv’
Anos, roi tyran de la planète Catiopé, voit son trône menacé lorsque son oracle lui révèle une prophétie. L’un de ses jumeaux à naître le renversera, aidé de sa future compagne. Anos ne peut le laisser détruire ce qu’il a mis si longtemps à bâtir et encore moins accepter qu’il interfère dans sa quête du Voyageur bleu, le seul capable de lui offrir plus de territoires à conquérir.
Rien ne peut se dresser entre lui et sa soif de pouvoir. Rien à part le destin…
On part sur une base de conte de fées : un tyran, une prophétie, une quête, l’obsession traditionnelle à vouloir dézinguer des gamins… dont certains passent à travers les mailles du génocide pour réaliser la fameuse prophétie (sans quoi, y a pas d’histoire).
Trame de Blanche-Neige et du film Willow pour ne prendre que deux exemples, avec en plus un air de légendes grecques (corpus mythologique où, comme dans les contes, on aime bien dégommer de la progéniture par paquets de cinquante).
Là-dessus, tu ajoutes une bonne dose de fantasy (magie, magie, et vos idées ont du génie) et une pincée de science-fiction (en parallèle à la planète Catiopé, certaines scènes se déroulent sur notre Terre à nous).
J’ai eu une petite pensée pour Phitanie, L’autre monde de Tiphaine Croville, qui partage des bases communes (inspiration grecque, tyran sanguinaire, monde parallèle à la Terre…). Après, les deux romans sont très différents et c’est ce qui fait la richesse de la littérature : tout est dans le traitement qui permet aux œuvres de se démarquer l’une de l’autre. À la fin, tu obtiens deux bouquins qui n’ont rien à voir, intéressants aussi bien dans ce qu’ils racontent que dans les choix de chaque auteur pour suivre sa propre voie.
Si tu veux t’embarquer dans la lecture du Voyageur Bleu, précisons qu’il s’agit d’une série. Donc il ne faudra pas t’étonner qu’arrivé à la dernière page, toutes les réponses ne soient pas données.
Est-ce qu’on reste sur sa faim pour autant ? Non, du tout. On reste en suspens – grosse nuance – en attendant de pouvoir lire le tome 2, Dualité (puis le tome 3, Tourment). C’est le principe d’une série de ne pas tout régler dès le premier volume. Je dis ça pour ceux qui n’auraient toujours pas capté le concept.
En soi, Prophétie tient ses promesses (ce qui colle plutôt bien à l’idée d’une prophétie). Nonobstant quelques défauts de jeunesse (certains éléments trop détaillés, d’autres pas assez), ce premier tome augure bien. L’univers est très riche et très construit, avec son vocabulaire propre et une galerie de personnages conséquente. De quoi noyer le lecteur ? Non, faut pas pousser mémé dans la fosse à crocodiles (sauf si elle t’a couché sur son testament). À moins d’en être resté aux aventures de Oui-Oui, le monde de Catiopé est accessible et présenté de façon à ce qu’on s’y retrouve. Sinon, si tu patauges… bah, qu’est-ce que ce sera quand tu t’attaqueras à ça :
Nan, parce que chez Tolkien et Herbert, du vocabulaire, des personnages et du world building, y en a à foison sur des centaines (voire milliers pour l’ensemble de leur œuvre respective) de pages.
‘Fin bref… Alors oui, il faut faire un effort pour se familiariser avec l’environnement et les protagonistes, mais la lecture est effort, pas une activité en pilotage automatique avec le cerveau éteint. Pour ça, il y a la télé.
La meilleure surprise du bouquin a été pour moi sa tonalité sombre. Je m’attendais à quelque chose d’assez féérique et lumineux. Que nenni ! Ça pique, ça morfle et c’est bien ! Parce que la fantasy en mode Disney où la pire chose qui puisse arriver au héros est de se casser un ongle, merci bien. Lapilus l’a bien compris : il ne peut y avoir de tension dans un monde de Bisounours. Il faut du danger, du sang, de la souffrance, afin que le lecteur ait peur pour les personnages et donc s’attache à eux (ou les déteste selon le camp dans lequel ils se situent).
Ce côté obscur m’a rappelé une paire de scènes de Phitanie où l’héroïne se faisait torturer. C’est marrant, parce que quand tu vois Croville ou Lapilus aux Halliennales, elles sont tout sourire… mais dans leurs bouquins, tout le monde prend cher, le knout est de sortie ! Je me dis que si un jour je dois me retrouver entre les deux dans un salon – sait-on jamais ? –, je ne vais pas faire le malin… oh non…
Maman, j’ai peur…