Avis à la population, le Salon du livre et de la francophonie d’Abbeville se tiendra les 18 et 19 mars prochains, avec pour invité le Québec.
J’y serai.
Je profite de l’occasion pour revenir sur l’édition 2016.
Abbeville est ma ville natale. Quand on me demande d’en parler, le mot napalm débarque très vite dans la conversation. Si on aime les euphémismes, on dira que je me montre “quelque peu” critique envers la ville et ses habitants (c’est-à-dire que je suis partisan de crucifier tout le monde, tout cramer, tout raser, couvrir la terre de sel et la vouer aux dieux infernaux pour 270 générations). J’en suis parti et j’en suis bien content.
Ceci posé, en attendant de jouer les semeurs de sel, je dois reconnaître à Abbeville un mérite, le seul : une politique culturelle dynamique depuis quelques années.
L’an dernier, je traînais dans les parages quand j’ai entendu parler du salon du livre première édition. J’étais assez dubitatif (euphémisme, encore), y allant presque à reculons. Je craignais le truc nasebroque, le salon du pauvre tout pourri.
A l’arrivée, c’était très bien, une excellente surprise. Sinon, je n’y retournerais pas cette année et je ne vous conseillerais pas de venir.
Or donc, il s’agit d’un salon généraliste où on trouve aussi bien du jeunesse que du policier, du dessin ou de la poésie. Il s’apparente à un aigle à deux têtes avec un très fort ancrage local doublé d’une ouverture à l’international via un invité du bout du monde. En 2016, le premier versant était représenté par des auteurs du cru (Thelen, Lapointe), quelques cousins ch’tis (Cluytens, Macquet), des ouvrages en picard, l’histoire locale (Préhistoire et Grande Guerre en tête), les polars régionaux (Ravet-Anceau et Pôle Nord). Le rayonnement mondial est assuré par notre ancien empire colonial : la francophonie. L’an dernier, un choix ô combien inattendu : le Bénin. Choix risqué aussi quand on connaît les scores de l’extrême-droite ces dernières années (entre 30 et 40%, no comment). Choix intéressant en tout cas, parce qu’on n’a pas l’occasion de rencontrer des auteurs béninois tous les jours. J’ai pu découvrir une littérature dont j’ignorais tout. Pari réussi, donc.
Le salon souffrait de quelques défauts de jeunesse. A commencer par un manque d’ambition des édiles locaux. Terme récurrent dans leur discours “les Abbevillois”… Si je comprends bien l’idée de penser en premier lieu à leurs administrés, je trouve dommage de n’avoir pas vu à plus grande échelle. Le salon a le potentiel d’attirer du monde au niveau du département et même de la nouvelle région XXL (je rappelle que le ch’ti n’est jamais que du picard). Les gens sont capables de venir de très loin pour un salon. Mon record personnel est de 10000 bornes. Certes, je suis un grand malade et pas forcément une référence. Mais de quelques échanges avec des visiteurs aux Halliennales ou à Esquelbecq, il appert que certains n’hésitent pas à se taper 100 ou 200 kilomètres pour un salon qu’ils apprécient.
Conséquence, sur place un manque d’indications pour trouver le lieu du salon : tout le monde ne sait pas où se trouve l’espace culturel Saint-André. Conséquence en matière de com’, un manque de portée et de visibilité. Je signale qu’on est dans les années 2010 et plus dans les années 80, certains outils modernes gagneraient à être exploités (par exemple, un site web et/ou une page Facebook ne serait pas de trop pour présenter le salon, les auteurs de l’année, les manifestations annexes autour du pays invité, etc. – cf. Polar Lens, Esquelbecq, Les Halliennales, Envie de Livres…).
Le système de vente était peu pratique. Les auteurs avaient UN exemplaire de chaque sur leur table. Si un autre visiteur le feuillette, tu dois attendre ton tour. Si le bouquin t’intéresse, tu le reposes, tu vas au stand librairie, tu cherches plus ou moins longtemps parmi les nombreuses piles, et enfin tu payes. Si plusieurs bouquins de plusieurs auteurs t’intéressent, là c’est le drame. Soit tu prends des notes au fur et à mesure et à la fin tu vas tout acheter d’un coup. Soit tu multiplies les allées et venues auteurs-librairie. J’étais avec ma mère, on a acheté 10 livres au total, on a dû passer 6 fois à la caisse ! C’est pas pratique, gonflant et une perte de temps.
Des petits défauts à corriger mais rien de gravissime. Le salon a d’ailleurs été un succès pour une première : 1000 visiteurs, 500 livres vendus (si tout le monde en achetait autant que moi, il en serait parti 10 fois plus). De mon avis à moi-je, une manifestation de qualité.
L’espace Saint-André, bâti sur les ruines d’une ancienne église, garantit au visiteur une paix royale contre les vampires, because terre consacrée. L’ambiance intimiste était très agréable, assez de monde pour animer les lieux mais pas trop au point d’étouffer. L’agencement permettait de disposer les auteurs au rez-de-chaussée et les trucs bruyants (ateliers pour enfants et projection de documentaire) à l’étage sans parasitage sonore..
Le salon s’inscrit dans un cadre plus large qui propose moult activités (lectures, conférences, rencontres, concerts, films, ateliers…) réparties sur plusieurs jours. La plupart sinon toutes sont gratuites (vu le taux de chômage record, il n’y a de toute façon pas d’autre choix pour rendre la culture accessible à tous). Bref, aucune excuse pour ne pas en profiter, que vous soyez du coin ou pas.
Si vous cherchez un salon sympathique et accueillant, plus peinard que LA grosse manifestation parisienne, riche et original dans son concept, Abbeville est une bonne adresse.
L’édition 2017 est inscrite sur mon agenda. Pour ceux qui veulent réviser, j’ai chroniqué très peu d’auteurs annoncés : Jean-Christophe Macquet (Mandoline vs Neandertal ; Un Américain sur la Côte d’Opale ; Le vampire du stade Bollaert) et Sophie Jomain (Cherche jeune femme avisée ; Les anges mordent aussi ; Les anges ont la mort aux trousses ; Quand la nuit devient jour) ; Marie-Laure Barbey-Granvaud est citée dans l’interview réalisée auprès de la même Jomain.
A priori, je serai au salon le samedi, donc si vous ne voulez pas me croiser, allez-y le dimanche. Sinon, vous cherchez un grand type habillé en noir, tatoué de partout, le cheveu long et la barbe abondante.
(PS : pour mes fans les plus excitées qui souhaiteraient une dédicace de leur culotte, merci de venir sans votre conjoint, surtout s’il est jaloux et baraqué.)
(Addendum : pour l’édition 2017, c’est là.)
Merci de faire de la pub pour notre belle ville… que j’ai quitté il y a une quinzaine d’années.
Je ne connaissais pas l’existence de ce salon.