Critiques express (10) Hellènes, ils s’appellent Hellènes

“That’s finally all anyone wants out of a book – to be amused.” Paraît que ça pète de démarrer sur une citation – pour le coup, Paul Auster dans City of Glass. Si le procédé n’était pas éculé comme une star du X, peut-être…
À deux mois et demi du bac, cogiter sur la pertinence de cette affirmation pourrait… ouais mais nan… On en arrivera à une énième impasse sur la définition impossible de la littérature, le sens de l’art et autres âneries sur lesquelles les philosophes s’échinent en vain depuis des millénaires.
On va juste pas se prendre la tête et jeter un œil sur quatre bouquins qui nous feront voyager dans la patrie des Hellènes. Tranquille, peinard, à la fraîche.

La Grèce antique archéologie d'une découverte Roland et Françoise Étienne Découvertes Gallimard

La Grèce antique, archéologie d’une découverte
Roland et Françoise Étienne

Découvertes Gallimard

Le titre pourrait laisser penser qu’on s’embarque sur une découverte de la Grèce antique par le biais de l’archéologie. Non. Enfin, si, un peu, mais c’est pas le cœur du sujet. Le propos des auteurs est d’étudier non pas la Grèce elle-même mais l’étude de la Grèce, sa découverte et ses redécouvertes régulières au gré des effets de mode à travers l’histoire (i.e. à la Renaissance après la chute de Constantinople ou début XIXe pendant la guerre d’indépendance).
À travers un texte écrit tout petit, petit – gros défaut de cette collection, dont les exemplaires sont fournis sans loupe – mais richement illustré, on va donc découvrir le regard porté sur la Grèce que ce soit par les Grecs eux-mêmes dans l’Antiquité par le biais des géographies et récits de voyage, ensuite par les Francs qui se rappellent que le patelin existe à l’occasion des croisades, puis entre les XVe et XVIIIe par toute une cohorte de gens issus de la Renaissance, de l’humanisme, des Lumières, et enfin, à partir du XIXe, des savants de tous bords avec la naissance d’une histoire et d’une archéologie modernes. Sur ce dernier point, les auteurs ouvrent d’ailleurs pas mal de dossiers et posent autant de questions sur tous les trésors grecs récupérés par les collectionneurs privés et musées du monde entier, rien moins que pillés sur le dos des Grecs.
Ouvrage intéressant, original par son sujet et source de moult réflexions tant sur la fascination de la Grèce à travers les âges que sur le traitement réservé aux trésors qu’elle nous a légués, qu’ils soient abstraits (philosophie, sciences, démocratie) ou très concrets (pillage des œuvres d’art).

Magna Grecia Les colonies grecques dans l'Italie antique Pier Giovanni Guzzo Découvertes Gallimard

Magna Grecia : Les colonies grecques dans l’Italie antique
Pier Giovanni Guzzo

Découvertes Gallimard

La Grande Grèce recouvre les établissements grecs dans la botte italienne, une bottine pour le coup puisque les Hellènes se sont installés tout autour du pied jusqu’à la cheville, ainsi qu’en Sicile (cette dernière très peu présente dans l’ouvrage alors que Syracuse n’est pourtant pas dans l’Antiquité ce qu’on pourrait appeler un bled paumé).
L’auteur va s’attacher en une grosse centaine de pages très chargées en illustrations à définir cette Grande Grèce, expliquer les raisons de cet essaimage au cours la période archaïque et retracer l’histoire de ces cités grecques sans l’être vraiment, puisqu’elles vivent dans leur coin, connectées d’assez loin à leur métropole dont elles sont indépendantes, et marquées par une relative acculturation avec les autochtones. Tout ça jusqu’à l’annexion progressive par Rome. À ce volet historique s’ajoutent plusieurs chapitres socio-économico-culturels (science, religion, agriculture…) pour compléter le portrait des colonies grecques.
Hormis l’absence de la Sicile que rien ne justifie, une bonne synthèse du sujet.

Périclès l'apogée d'Athènes Pierre Brulé Découvertes Gallimard

Périclès, l’apogée d’Athènes
Pierre Brulé

Découvertes Gallimard

Parce qu’on l’a souvent confondu avec l’inventeur de l’alcool de menthe, le célèbre père Ricqlès, il fallait bien cet ouvrage pour rétablir la vérité sur Périclès, homme d’État athénien qui n’a rien inventé mais n’est pas pour autant resté à se tourner les pouces. Si vous vous attendez à trouver une simple biographie du bonhomme dans ces pages, que nenni. Comme l’indique le sous-titre, on va surtout parler d’Athènes à l’époque de Périclès : le Ve siècle, considéré comme l’âge d’or de la cité, berceau de la démocratie pour les hommes et de rien du tout pour les autres (femmes, enfants, étrangers, esclaves et autres exclus de la participation civique à la bonne marche de la cité). Certes Athènes est à son apogée en terme de puissance, cause et conséquence de tout un tas de guerres et batailles. Y a-t-il de quoi applaudir pour autant ?…
Enfin bref, Brulé dresse un portrait rapide – obligé vu le format court des ouvrages de cette collection – mais complet de l’Athènes classique au siècle de Périclès. Il en ressort que sur le plan artistique, on peut bien parler d’âge d’or, mais que pour le reste, je ne vois pas trop de quoi pavoiser ni s’extasier devant le modèle athénien (qui n’est jamais qu’une oligarchie impérialiste et bourrine).

Le mont Athos merveille du christianisme byzantin André Paléologue Découvertes Gallimard

Le Mont Athos, merveille du christianisme byzantin
André Paléologue

Découvertes Gallimard

Sans lien de parenté avec le mousquetaire homonyme, Athos est une montagne qui accueille une communauté monastique orthodoxe répartie dans vingt monastères. Deux mille moines vivent là sous l’autorité directe du patriarche œcuménique de Constantinople et tintin pour l’évêque local. Patriarcat, c’est le maître mot de ces lieux où toute créature femelle est interdite d’entrée, hors félins et gallinacées. Des chattes, oui, des poules, oui, mais des femmes non.
Haut lieu de la spiritualité ou formidable concentré de trous du cul rétrogrades, à cette question l’auteur a choisi la première réponse. Il retrace l’histoire de l’endroit, décrit la vie quotidienne des moines et s’attache à suivre la quête mystique qui occupe les moines, le tout avec force illustrations et photographies. Le gars aime son sujet et restitue bien son admiration, ce qui rend le texte intéressant… mais dépourvu de la moindre objectivité et lacunaire sur les points qui fâchent (mentalités d’un autre temps, juridiction maison qui n’a que faire du droit national pour tout ce qui ne relève pas du pénal…). Soit une description des lieux certes belle mais tout autant partielle que partiale, donc à prendre avec des pincettes.

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