Né à Tōkyō le 18 janvier 1947 , Kitano est un acteur, réalisateur, producteur, scénariste, animateur télé, comique, peintre, écrivain, poète et chanteur japonais. Rien que ça.
Cet homme-orchestre est aussi connu comme Beat Takeshi (ビートたけし), nom de scène qu’il emploie en alternance avec son patronyme Kitano Takeshi (北野 武) selon la teneur comique ou dramatique de ses œuvres. Si l’Occident a découvert et retenu le nom du sérieux Kitano, le Japon connaît surtout le clown Beat Takeshi. Comme bien souvent, le nom passé en Occident n’est pas celui utilisé par les Japonais. C’est d’autant plus con qu’à l’exception de ses travaux de réalisateur, Beat Takeshi est le nom qu’emploie Kitano lui-même…
Après des études d’ingénieur dans la très prestigieuse Université Meiji, Kitano travaille comme réparateur d’ascenseurs dans une boîte de strip-tease de Tōkyō. C’est là qu’il fera ses débuts sur les planches. En effet, en numéros à base de loches et de fesses à l’air, la boîte présente des sketches et lorsqu’un comique tombe malade, Kitano prend sa place sur scène. L’histoire ne dit pas s’il assurait aussi la relève de ses collègues féminines strip-teaseuses.
Avec son ami Kaneko Kiyoshi, ils créent les Two Beats en 1972 (Beat Takeshi et Beat Kiyoshi) et se lancent dans le manzai (漫才). En bref, le manzai est une forme de comédie à base de duo comique sur un modèle analogue au binome auguste/clown blanc.
Les Two Beats interprètent des sketches satiriques improvisés. Leur parcours les emmène jusque sur les plateaux de télé en 1976 où leur succès est immédiat et prend une échelle nationale. Dans la foulée, Kitano épouse une consœur, Matsuda Mikiko (松田 幹子), elle aussi comique manzai.
Kitano finit par dissoudre le duo et se lance dans une carrière solo. Entre 1986 et 1989, il présente un jeu télé intitulé 痛快なりゆき番組 風雲!たけし城 (abrégé en たけし城). Croisement improbable d’Intervilles, Vidéo Gag et Benny Hill Show, le tout sous LSD, ce Takeshi’s Castle est au bon goût ce que je suis à la modestie. Kitano supervisera la conception du jeu vidéo tiré de l’émission, たけしの挑戦状 (Le défi de Takeshi). Sur l’écran titre, on pouvait lire “ce jeu a été réalisé par quelqu’un qui déteste les jeux vidéo”. On ne retiendra des épreuves d’un haut niveau de débilité comme chanter pendant une heure sans s’arrêter, appuyer pendant 4 heures sur la touche “select” ou encore frapper le boss final 20000 fois.
Au début des années 80, Kitano se lance dans le cinéma. Au cours de la décennie, ses deux rôles marquants seront celui d’un sergent sadique dans Furyo (1983) et d’un policier sociopathe dans Violent Cop (1989). Ce dernier film le révélera comme un excellent acteur dramatique, qui tranche avec les shows et rôles comiques pour lesquels il était connu jusque-là.
C’est sur le tournage de Violent Cop qu’il fera ses premiers pas de réalisateur. En effet, Kinji Fukasaku, tombe malade et Kitano le remplace au pied levé. C’est une manie chez lui de jouer les remplaçants… Kitano vient de se trouver une nouvelle voie : la réalisation.
L’année suivante, il se lance comme scénariste sur Boiling Point qu’il réalise avec une maîtrise rare pour un débutant. Il a déjà trouvé son style à base de violence intense, d’humour noir déroutant et d’images arrêtées.
Avec Sonatine en 1993, son audience dépasse le cadre national et il commence à se faire remarquer à l’étranger.
Un grave accident de moto en 1994 marquera la suite de son oeuvre (sa fascination pour la mort, les tics nerveux qu’il intégrera dans son jeu d’acteur ou encore le fait qu’il se remette à la peinture).
Son succès ne cesse de croître. Une apparition dans Johnny Mnemonic pour le versant international, d’immenses succès au Japon avec Kids return (1996) et Hana-bi (1997). Ce dernier film marque l’élargissement notable de son public à l’étranger ; idem au plan critique (sans doute son film le plus récompensé à l’international, notamment par un Lion d’Or à la Mostra de Venise).
On le verra ensuite dans Taboo (1999) et Battle Royale (2000). Il connaît cependant certaines déceptions : Aniki (2001) le guérit de s’embarquer sur la voie hollywoodienne, tandis que Dolls (2002) marque la rupture avec son compositieur fétiche Joe Hisashi.
Toutefois en 2003, il signe son chef-d’oeuvre de réalisation : Zatoïchi. Malgré un choc initial devant un Zatoïchi blond (!), le film remporte un énorme succès au Japon autant qu’à l’étranger.
Depuis, beaucoup ont parlé de “panne d’inspiration”, le sieur Kitano ayant accumulé les revers critiques et commerciaux. N’ayant pour ma part vu aucun Kitano depuis l’excellent Zatoïchi, je ne vais pas épiloguer juste pour parler dans le vent.