Paraît que le bouquin est bien. Sauf que le film est nase à un point qui dissuade de remettre le nez dans cette histoire, sous quelque forme que ce soit. En plus, le seul livre que j’ai lu du même Max Brooks, Guide de survie en territoire zombie, ne m’a pas emballé du tout, donc peu probable que je me lance un jour dans la lecture du roman.
Étant aussi peu inspiré que le film, je me contenterai d’un plan basique en deux parties : points positifs/négatifs.
Les moins
– World War Z est un film de zombies. Pas que ce soit un mal en soi, mais y en a ras le cul des zombies à toutes les sauces. Films, séries, jeux vidéos, BD, romans et j’en passe… Depuis que 28 jours plus tard a relancé le genre en 2002 en le sortant du nanar où il stagnait depuis la fin des années 80, on peut dire que l’invasion a commencé. Un peu comme les super-héros, en fait. Y a un moment où il faut arrêter de surexploiter le filon en nous servant la même soupe jusqu’à la nausée.
Alors les super-héros, mauvaise nouvelle, on est parti pour continuer à en bouffer pendant encore quelques années. La mode zombie s’est calmée depuis le milieu des années 2010, mais trop tard pour bibi, gavé depuis un bail, et un film de zombies ne part pas gagnant, à moins d’être exceptionnel. Et c’est pas le cas ici. Du tout.
– La scène d’intro, de loin la plus horrible du film. Les gamines qui réveillent leurs parents (cliché), le petit déj’ en famille (cliché) avec pancakes (cliché), y a du soleil, la vie est belle. Dans le genre exposition stéréotypée, ça se pose là.
– La shaky cam pendant la scène de l’embouteillage. Bonjour, mon caméraman est un parkinsonien qui a mangé des pois sauteurs et filme sur un trampoline. Coup de bol dans WWZ, le réalisateur a le bon goût de l’utiliser avec parcimonie. De tous les films que j’ai vus où la technique est employée, un seul le fait avec assez d’efficacité pour créer une réelle immersion : Il faut sauver le soldat Ryan, dans la fameuse scène du débarquement. Le reste (Cloverfield, Rec, Blair Witch…), c’est de la merde.
– Les incohérences, facilités d’écriture, grosses ficelles scénaristiques et péripéties téléphonées sont légion, trop nombreuses pour les citer toutes. Je me contenterai d’une paire d’exemples.
Sans déconner, le coup de la fille asthmatique qui a perdu son inhalateur, y a encore des scénaristes qui ose employer ce ressort éculé ? Moi je serais allé jusqu’au bout : sa sœur aurait pu être diabétique et à court d’insuline.
Passons sur le coup de fil où la femme de Brad annonce qu’elle a des fusées éclairantes pour signaler leur présence à l’hélico. Je sais bien que le sac à main d’une nana regorge d’artefacts dont on n’a pas idée mais quand même.
Que dire du passage dans l’avion où on nous montre un clébard deux,trois fois histoire qu’on capte qu’il va servir plus tard. Quand l’hôtesse se baisse pour caresser l’immonde roquet, on ne s’attend pas du tout à ce que pouf un zombie lui bondisse à la gueule. Enfin, si, en fait, un peu. Beaucoup même.
Ajoutons l’immonde deus ex machina “j’ai un pote qui peut m’envoyer un hélico pour qu’on se planque sur un porte-avions”. Sympa, le poto.
Sinon, on sera heureux d’apprendre qu’une main coupée n’est douloureuse que cinq minutes, après faut juste serrer les dents. Et le lendemain, c’est bon, tu ne sens plus rien. Par contre, tu boites. WTF ?!?
Quand on voit la liste des bras cassés qui se sont succédés au scénario, tout s’explique. J. Michael Straczynski (Thor, Ninja Assassin), Matthew Michael Carnahan (Le Royaume, Lions et Agneaux), Damon Lindelof (Cowboys & Aliens, Prometheus) et enfin Drew Goddard (Cloverfield). Que du lourd.
– Le recueil de péripéties aussi chiant que le catalogue des vaisseaux, que du vu et revu. La famille à sauver, la mission de la dernière chance que tu peux pas refuser, la visite de la base abandonnée, l’attaque du château-fort, la catastrophe aérienne, le huis clos dans le labo… Le pot-pourri de Rambo, Alien, Resident Evil, Des serpents dans l’avion, Troie… Pas qu’on s’ennuie ou que le film manque de rythme, juste qu’on dirait une suite de sketches balancés à la suite, sans liant et sans imagination. On saute d’une scène l’autre, d’un pays l’autre, d’un château l’autre, dans une espèce de fresque décousue. Un vague fil rouge et beaucoup de fil blanc dans ce jeu de piste planétaire.
Le personnage de Brad résume bien le film dès le début : “faut bouger, faut rester en mouvement”. Donc on s’agite, on cavale et comme en politique, on attend toujours le résultat après ce brassage d’air. Je ne pensais pas qu’il existait encore des scénaristes et des réalistes pour croire naïvement que le film avance parce qu’un personnage court. Ben si.
– Les placements produits top discrétion. Le camping-car Chevrolet au début, et l’inénarrable pause Pepsi à la fin.
– Pour la 5681945e fois au cinéma, un Américain sauve le monde. Personne n’en sera étonné puisque d’après la télé ou le ciné, l’Américain moyen est forcément passé par la case police, armée ou services secrets, sait manier toutes les armes de la hache de pierre à la bombe nucléaire, maîtrise douze arts martiaux et possède un sens tactique qui ferait passer César, Napoléon et Clausewitz pour des rigolos.
Je me dis que c’est un peu comme les mecs qui se vantent de leur organe siffredien alors qu’une coquillette leur pend entre les jambes, faut croire que les Yankees ont besoin de compenser pour se montrer si héroïques et efficaces à l’écran.
Un point réaliste tout de même à signaler : il arrive que le personnage de Brad sorte de son modèle fictionnel et redevienne un Américain dans la moyenne, donc un débile profond. Balancer une grenade dans un avion, ce genre d’idée de génie se passe de commentaire superflu.
– Zéro tension. Quelles que soient les circonstances, même un crash d’avion, on sait que Brad va s’en sortir comme une fleur. Avion qui s’écrase à 200 mètres du labo où Brad doit aller, comme par hasard. C’est ce qui s’appelle “bien tomber”.
– Vouloir faire un film de zombie sur un mode différent de ce qu’on a déjà vu et revu, ok. Excellente idée même, vu comment le genre tourne en rond. Mais là, putain… Je ne suis pas sûr d’avoir vu une goutte de sang. Ah si, quand Brad se prend un bout de carlingue de vingt centimètres dans le bide, y a une petite tache sur sa chemise. J’en tremble encore…
Et les mecs, pendant tout le film, essaient de te vendre l’horreur du truc. Mais y a rien qui suscite un semblant d’horreur, ou de peur, ou d’épouvante, ou de n’importe quoi. Suffit pas de coller des zombies en train de sprinter ou de faire la lutte gréco-romaine. Sans donner dans le gore caca beurk ou la débauche de sang par hectolitres, on tombe dans l’extrême inverse : plus familial, tu meurs (mais tu reviendras d’entre les morts). World War Z est l’enfant contre-nature de Romero et Disney.
– Brad Pitt n’apporte rien de particulier. Un parfait inconnu pas trop mauvais acteur aurait aussi bien fait l’affaire. Son personnage plus lisse que les fesses de bébé Cadum suscite zéro empathie et autant de sympathie ou d’antipathie. Le reste du casting se montre aussi transparent que leurs personnages. Le film tourne avec UN protagoniste et une cohorte de silhouettes.
– À l’image des personnages squelettiques, le film ne s’arrête sur aucun enjeu de fond. À part la course-poursuite de Brad, vide sidéral. Le genre de repos intellectuel qu’on atteint d’ordinaire avec les “meilleurs” Seagal, c’est dire le niveau
Les plus
– Je n’ai pas lu le livre. Je ne pourrai donc pas dire tout ce qui cloche en terme d’adaptation. Pour ce que j’en sais, la ressemblance entre les deux œuvres se limite au titre.
– J’ai beaucoup ri pendant le passage en Corée. Entre la mort débile du virologue et les Coréens arracheurs de dents, j’ai failli me pisser dessus.
Les scientifiques et leurs répliques qui tuent, c’était pas mal non plus : “on ne peut pas rendre un mort malade”, “infecter la population avec une maladie létale, c’est loin d’être un remède”. À défaut d’un doctorat en médecine, ils ont décroché haut la main leur diplôme de brèves de comptoir.
Un faux plus, parce qu’il s’agit d’une maladresse du film, mais bon, au moins, il m’aura fait vivre un petit quelque chose. Ça fait quand même pas beaucoup…