Après Frankenstein’s Army, deuxième volet de la trilogie zombies nazis. On continue dans le “pire tout pire” avec War of the Dead. Un film dont le scénario se situe quelque part entre Prometheus et Écarte tes cuisses, je trouve plus ma montre : deux-trois idées débiles qui partent en vrille vers les tréfonds du néant.
(PS : je décline toute responsabilité quant aux résultats de recherches sur les titres cités…)
Épisode II
War of the Dead
(Marko Mäkilaakso, 2011)
War of the Dead est un film américano-lituano-italien réalisé par Marko Mäkilaakso, un Finlandais, et présenté au Canada lors du Festival de Toronto en 2011. Un parcours aussi mondial que la guerre à laquelle il se rattache.
Allons droit au but et disons-le tout de suite, sans ambages et sans passer par quatre chemins : en un mot comme en cent, ce film est nase. Terme sur lequel je pourrais rebondir pour un truculent jeu de mot avec nazi, mais je m’en voudrais d’entacher ma réputation de sérieux.
Première erreur monumentale, le choix dans le titre à défaut de la date. “Of the Dead” sonne très Romero et donc très prétentieux quand on n’est pas lui. À l’origine, le film devait s’appeler Stone’s War, d’après le nom d’un personnage, le capitaine Martin Stone, connu pour avoir un cœur de pierre et rester de marbre. Mais la production a traîné en longueur, le film passant de mains en mains telle une patate chaude vérolée et contagieuse. Changement de titre, de casting, d’une ligne par-ci par-là dans le script, autant de bidouillages propices aux pires créatures de Frankenstein filmiques.
À la lecture du scénario, abandonne toute espérance en matière d’originalité. Le pitch : des scientifiques nazis aka savants fous (comme c’est original) mènent une expérience visant à créer des zombies (comme c’est original) auxquels sont confrontés de courageux soldats américains d’élite, triple pléonasme (comme c’est original), sur fond de bunker avec son espace confiné et ses couloirs sombres (comme c’est original). On sent à peine la repompe d’Outpost…
Vous êtes prêts ?… C’est parti !
Tout commence par un résumé historique qui laisse pantois. Ainsi on apprend qu’en 1939, l’Allemagne nazie mène des expériences le long de la frontière russo-finlandaise. Le IIIe Reich n’est à l’époque l’allié d’aucun des deux pays, pourquoi et comment les Teutons sont-ils arrivés là pour monter leur camp de prisonniers et leur labo en douce ?… L’opération Barbarossa ne démarre que deux ans plus tard, d’où sortent ces prisonniers russes ? D’une faille temporelle ?… À cette date, ce ne sont pourtant pas les médecins sadiques, savants fous et scientifiques agités du bocal qui manquent sur le sol germanique, pas plus qu’un gigantesque réservoir de cobayes vu la politique d’internement à l’égard des communistes, juifs, homosexuels, malades mentaux, témoins de Jehovah, tziganes, jenpasse et desmeilleures. Mais non, c’est tellement plus simple d’aller parachuter une bande de gus pour capturer des Russkofs et risquer de se retrouver avec l’URSS sur le dos.
Le laïus se poursuit pour nous apprendre que deux ans plus tard, l’expérience est bazardée, les archives détruites, les sujets expérimentaux enterrés. C’est con, pile au moment où la Wehrmacht déboule en URSS et où les prisonniers russes s’accumulent dans les camps, hop, on remballe.
1941 : une unité d’élite américaine accompagne une troupe finlandaise pour se battre contre les Russes. Sans déconner ? Je n’ai pas souvenir d’un affrontement USA-URSS à cette date. Je les croyais dans le même camp, maintenant que j’y pense. Et puis les Américains en 1941, à part les trois dernières semaines de décembre, on ne les a pas vus des masses sur les champs de bataille. Et c’était de l’autre côté, sur le mal nommé front Pacifique. Enfin, à la date où les USA entrent en guerre, la Finlande combat aux côtés de l’Axe depuis six mois.
Par la suite, on comprendra qu’il y a confusion avec la Guerre d’Hiver, sauf que ni les Américains ni les Allemands n’y ont participé et qu’elle n’a pas eu lieu en 1941 mais de novembre 1939 à mars 1940. Des détails sans importance…
Comme dit plus haut, le réalisateur est finlandais… il est aussi scénariste… Il a dû prendre histoire option touriste à l’école. S’il filme comme il écrit, la suite laisse présager du pire. Par indulgence, je ne lui jette pas la Stone, la responsabilité en incombe peut-être à son co-scénariste Barr B. Potter. Quel crédit pourrait-on accorder à un type qui s’appelle Barbie, comme Claus ou la poupée ?
L’objectif de la mission américaine ? Détruire le bunker russe. Pas “un”, “le”. L’URSS est défendue en tout et pour tout par un blockhaus. One bunker to rule them all! Si vous le faites péter, vous gagnez la guerre ! Un tower defense ultra minimaliste… Comme on l’apprendra par la suite, personne n’avait la moindre idée de ce qui se tramait dedans… et donc aucune raison de le détruire.
Bref, des Américains traînent leurs guêtres dans les forêts finlandaises. Sachant qu’en 1941, les Yankees glandouillent jusqu’en décembre, on se dit que l’hiver est bien clément cette année-là. Parce que l’hiver finlandais ressemble à ça en vrai :
Là, non. Vas-y que chacun se promène manteau grand ouvert, tout dégavé. Verdure et soleil. Pas un flocon, pas un pet de givre.
Cette photo est représentative du joyeux foutoir où on peine à savoir qui est qui. On reconnaît les Américains à leurs casques, du moins ceux qui ne le considèrent pas comme une option. Le choix de mêler des éléments finlandais s’avère peu judicieux : en 1941, leurs casques ressemblaient au modèle allemand, leurs pistolets-mitrailleurs avec chargeur camembert à ceux des Russes. Je m’interroge toujours sur la présence de PM teutons dans les rangs de cette escouade de bric et de broc. Pour une opération soi-disant préparée, on dirait que chacun s’est équipé à la dernière minute avec le matos qui traînait à l’armurerie. Une vraie foire à la brocante…
Les uniformes verts-bruns-sales finissent par tous se ressembler et pour le peu qu’on en distingue, les zombie portent aussi bien le brun règlementaire de l’Armée Rouge que le vert-de-gris propre aux bouffeurs de choucroute. Les scènes de nuit n’arrangent rien au jeu du qui est qui. Rocco ne retrouverait pas ses chattes qui elles-mêmes n’y retrouveraient pas leurs petits.
Comme dans tout bon film d’horreur, avant de se trouver confrontée au croquemitaine, la petite troupe croise un mec bizarre, genre vieux cinglé crasseux gérant de station-service qui les met en garde contre l’Ile de la Désolation (ou la Montagne Maudite ou la Forêt du Massacre ou le Lac de la Mort qui tue), des fois que le nom de l’endroit ne soit pas assez dissuasif. Nul n’écoute ses avertissements et ça finit mal.
War of the Dead ne déroge pas à la règle. Personne ne trouve louche qu’un pépé vive seul dans une cabane au fond des bois, en pleine zone de guerre, avec des tas d’objets étranges sur son bureau. La caméra prend le temps de s’attarder dessus. Histoire qu’on comprenne l’importance des bidules fusil-de-tchekhoviens, un Finlandais en barbote un, discret comme une Panzerdivision. À part un panneau lumineux indiquant “warning! artefact mystérieux utile au scénario !”, on ne saurait se montrer moins subtil. Le spectateur ne se doute pas qu’il y a anguille sous roche et s’attend à peine à revoir le bitonio par la suite. Il est très con, ce spectateur hypothétique…
En deux minutes, l’armada pas invincible plie l’assaut du bunker. Feu nourri des Russes, la troupe de pieds nickelés se trouve duocimée. Comme décimer mais en pire : la moitié reste sur la carreau.
Z’étaient déjà pas bien nombreux au départ… Faut dire aussi, attaquer une position fortifiée et largement pourvue en défenseurs avec une poignée de gus sans appui d’artillerie ou d’aviation et sans armement plus lourd qu’une malheureuse grenade… De la haute stratégie… Je rappelle qu’il s’agit d’une opération planifiée par deux états-majors et exécutée par un commando d’élite…
La nuit tombe. Boum. Pas besoin de feu pour se réchauffer, personne n’a froid. Juste deux-trois torches qui brûlent dans le campement, histoire que la position soit bien repérable.
Contact avec les zombies ! Catégorie super méchants à la mode depuis 28 jours plus tard (super rapides, super forts, super montés sur ressorts à bondir en tous sens). Il en tombe trois-quatre depuis les arbres au milieu du campement. Les zombies attaquent un des soldats dont les potes gisent déjà morts, sans doute terrassés par un mal inconnu et foudroyant. Dans le doute, les officiers se font la malle, parce ce que ce serait con de défendre la position et de sauver la peau du peu d’hommes qu’il leur reste. Mieux vaut suivre à la lettre le manuel tactique du slasher : disperser ses forces au maximum et foncer dans le noir à l’aveuglette vers l’inconnu, à savoir la forêt pleine de monstres.
Quinze minutes de film, la soi-disant unité d’élite est déjà anéantie…
As de l’orientation, les quatre survivants se livrent à une manœuvre militaire aussi audacieuse qu’involontaire : battre en retraite droit vers les lignes ennemies. Ils débarquent en pleine tranchée russe. Coup de bol, plus personne ne la défend, ce qu’on mettra sur le compte des zombies affamés ou d’un budget figurants famélique.
Après avoir capturé un Popov qui passait dans le coin parce que c’est marqué dans le script, direction une cabane perdue au fond des bois (encore une…). Nouvelle attaque de zombies dans ce Fort Alamo du pauvre. Ô surprise indicible, un zombie parvient à mordre l’officier finlandais pendant l’assaut. Ne reste qu’à patienter jusqu’au prochain topos, la formidable surprise de sa métamorphose.
Un jour, faudra quand même qu’on m’explique d’où sort cette idée farfelue d’un zombisme viral qui se transmet par morsure. Question rhétorique, je connais déjà la réponse. Le zombie de cinéma mériterait un nom bien à lui pour le différencier du “vrai” zombie vaudou avec lequel il n’a plus le moindre rapport. Il est fort et rapide, cabriole dans tous les sens, résiste aux balles, meurt quand on lui pulvérise la tête et transmet son mal par morsure. Bah, j’appelle ça un vampire. À part la sensibilité à la lumière du soleil… Et encore, depuis Twilight, le soleil… Enfin bon, Twilight, c’est Twilight. Y a plus que la dégaine à les différencier : le vampire est au zombie ce que James Bond est au clodo.
Après quelques remaniements internes, un Américain, un Finlandais et un Russe embarquent non pas dans une mauvaise histoire drôle (quoique…) mais dans une bagnole qui traînait au fond de la cabane. Le fier équipage s’arrête dans un village abandonné. “L’endroit est sûr”, dixit le Russkof. “Non, rien n’est sûr”, rétorque le Ricain, qui décide quand même d’y faire une halte en vertu d’une logique qui n’appartient qu’à lui.
Là-dessus, on n’est plus à un cliché près, un orage éclate.
Par une heureuse coïncidence, qu’on baptisera au choix magie du cinéma ou invraisemblance scénaristique, le Russkof retrouve sa petite amie, planquée dans un placard (défense imparable contre les zombies). Commence alors une grosse partouze…
Ce Russe a décidément un don. Après avoir trouvé une cabane, une voiture et une nana, il sait où dégotter une radio. Dans le fameux bunker russe. Qui auparavant était celui des Allemands. Les Chleus ont failli à leur réputation d’efficacité en effaçant mal leurs traces, puisque le Russe mentionne leurs expériences contre-nature. Sur la base de rien, l’Américain en conclut qu’elles portaient sur l’immortalité. Un tel sens de la déduction renvoie Sherlock Holmes au bac à sable des détectives.
Nouvelle attaque des zombies. Eux aussi dotés du gène de la trouvaille, ils n’ont aucun mal à deviner où se terraient les trois pauvres mousquetaires. Retrouver des trucs, sport national en URSS. Ne jamais défier un Popov à “où est Charlie ?” parce que même mort, il gagnerait.
L’Américain réveille le cow-boy qui sommeillait en lui. Il s’enfuit à cheval en balançant un “dégagez de là, vermines communistes”, formidable de nanardise. Après quinze mètres de cavalcade, il monte dans la bagnole. Pourquoi le canasson, qui n’a servi que dix secondes ? Caprice d’acteur ?
Le bolide fonce à quinze à l’heure dans les bois jusqu’au bunker russe dont les abords sont jonchés de carcasses allemandes (des véhicules, pas des bonshommes). Décidément quelle efficacité pour couvrir leurs traces, ces Boches ! Pour le travail de pro, ils repasseront. Des trucs crament par terre. Quoi ? Pourquoi ? Comment ? On ne sait pas. Trois flammèches au ras des pâquerettes pour une ambiance de désolation, un peu léger. Vu que les Allemands sont censés avoir quitté le bunker depuis des jours, voire des semaines, pourquoi les véhicules détruits brûlent-ils encore ?…
Le puissant cortège s’avance vers le bunker. L’Américain, à courts de bastos pour son PM, dégaine son flingue. Le Finlandais dispose toujours de son inépuisable mitraillette. Le couple russe reste les mains vides, pas même armé d’une faucille ou d’un marteau. Jusqu’ici, personne n’a eu l’idée de chercher des armes et des munitions. Même quand ils tombent sur une caisse de grenades, ils en piochent royalement… deux. Encore un classique du film d’horreur : affronter l’ennemi sans même un canif, sinon c’est pas marrant.
Le bunker… On nous avait annoncé au début que les Chleus avaient balancé les archives de l’opération au feu, mais ils ont laissé le labo en l’état. Bravo ! En prime, une photo du groupe SS dont l’un arbore bien en évidence, je vous le donne en mille, l’artefact mystérieux aperçu chez le vieux du début ! On ne saura jamais comment le bidule a atterri chez lui. D’une péripétie l’autre, la babiole fauchée par le Finlandais a été récupérée par le Russe avant d’atterrir entre les mains de l’Américain. Ce dernier en déduit qu’il s’agit d’une clé, hypothèse étayée par rien. La clé ne sert qu’à ouvrir un couvercle sur la table d’opération où les Allemands injectaient le produit aux cobayes. Ne me demandez pas l’intérêt de sceller un couvercle dessus juste pour une piquouse, je n’y connais rien en médecine nazie.
Notez que les Russes qui occupent les lieux ne se révèlent pas plus doués pour le ménage. Certaines pièces sont encore pavoisées de drapeaux à croix gammée. Ils n’ont pas pris la peine de virer les cadavres de SS avant d’occuper les lieux. Un bunker ? Que nenni ! une auberge espagnole ! mi-allemande, mi-russe, avec un soupçon de Finlande et une pincée d’Amérique.
En route pour la phase d’exploration. Commence alors le flot de péripéties habituelles. Disparition de la nana. Découverte d’un survivant… contaminé (c’est con, hein ?). Attaque d’un zombie surgi de nulle part. Coupure de courant. La pouf crève sur fond de piano et violon. L’Américain décide d’affronter en solo la horde de monstres armé d’une minable pétoire et de son courage (plus quelques cocktails Molotov pour la route). Ah, héroïque Captain Cliché America… Tel un boss de fin de niveau, l’officier finlandais contaminé ressurgit. On ne l’avait pas vu venir… Le Yankee l’affronte à mains nues. Une idée de génie : son adversaire est immunisé à la douleur, dispose d’une force surhumaine et ne craint pas grand-chose d’un bourre-pif vu qu’une balle ne l’arrête pas.
Pas de scène de baston avec le gros méchant, peut-être par peur de choquer le spectateur avec de la violence ou du gore. Non, ça c’est bon pour les films d’horreur… Hé, mais attendez !… Non rien…
Pendant ce temps, le duo Laurelov et Härdynen a contacté le QG pour bombarder la zone à 9 heures pétantes. Le spectateur se trouve cloué à son fauteuil par le suspense insoutenable sans se douter le moins du monde qu’il y en aura bien un pour sortir à 8h59.
Course-poursuite dans le dédale de couloirs. Le Russe meurt connement en tombant d’un échelle, quelque peu aidé par un zombie. On a bien sûr droit à la scène “attrape ma main”, variante de “tire mon doigt”. Son pote finlandais s’en sort. L’Amerloque le rejoint, sans qu’on ait la moindre idée de comment il a fait.
Déroulez le tapis de bombes ! Un ballet de chasseurs numériques mal dessinés vient arroser la zone. Les avions n’ont rien sous les ailes ou la carlingue, mais il parviennent à lâcher des bombes numériques sorties de nulle part. Le spectateur, atterré, se demande pourquoi, dès le départ, l’armée n’a pas bombardé le bunker au lieu d’envoyer une poignée de gonziers incompétents au casse-pipe.
Les deux couillons survivants foncent tête baissée dans un bataillon russe et sont faits prisonniers. On espère qu’ils passeront une captivité de souffrances infinies dans un goulag sibérien. The end.
Avertissement : La phrase précédente spoile la fin.
Au final, un War of the Dead pas terrible, sans autre intérêt que sa cocasse médiocrité.
Il y a beaucoup de pugilat contre les zombies (la pire méthode pour s’en débarrasser), donc une relative dose d’action qui évite de s’endormir. Répétitif quand même… Les dialogues peu nombreux figurent au rang des points positifs. Limite, on pourrait s’en passer puisqu’ils n’apportent rien. Dès lors qu’une question est posée qui pourrait faire avancer le schmilblick, on a droit à une réponse vague genre “je sais pas” ou une attaque de zombies qui coupe la conversation.
À part ça, originalité zéro d’un film qui n’apporte rien au genre et navigue dans le déjà vu mille fois. Presque pas de scènes gore pour les amateurs, des incohérences historiques aussi énormissimes qu’évitables, un scénar pas fichu d’exploiter correctement les trois malheureux éléments qui le constituent, un ensemble très moyen qui pue la pauvreté.
On peut donc vivre et mourir (voire renaître en zombie) sans avoir vu War of the Dead, on ne perd rien.
Star Wars of the Dead :
– épisode I : Frankenstein’s army
– épisode III : Nazis at the Center of the Earth