Paru entre 1981 et 1985, le manga Cat’s Eye de Tsukasa Hōjō avait eu droit à sa série animée en 1983-1985, Cat’s Eye en VO, Signé Cat’s Eyes en VF. En 1997, sort sur les écrans de cinéma une adaptation live, CAT’S EYE キャッツ・アイ, réalisée par Kaizō Hayashi (ou Hayashi Kaizō dans l’ordre japonais nom/prénom, mais ça reste le même gars).
C’est une daube.
Le film s’ouvre sur une scène d’animation pour le clin d’œil (et sans doute aussi pour le marketing) à l’anime. C’est sympa, ça rappelle des souvenirs d’enfance, c’est l’occasion aussi de poser la première différence du film : les costumes. Fini le temps des combinaisons moulantes en lycra, place au combo latex-vinyle, qui passe bien en dessin animé, beaucoup moins en live avec un rendu mi-cheapos mi-vulgos. Autre différence, les donzelles portent des masques de chat. Bon, l’idée se tient. Quand on voit le nombre de fois où, dans l’anime, leur identité a failli être révélée puisqu’elles opèrent à visage découvert, on se dit que les voleuses d’élite avaient peut-être besoin de revoir quelques bases du cambriolage. C’est corrigé ici. Par contre, on sent pas mal la repompe sur Batman Le Défi de Burton sorti en 1992 et la volonté de surfer sur le succès et la popularité de la Catwoman interprétée par Michelle Pfeiffer. On a moins l’impression de voir les Cat’s Eyes qu’un trio de cosplayeuses grimées en Catwoman, avec un petit budget costume, parce qu’autant Pfeiffer avait la classe, autant là on s’attend à ce que le film vire à la soirée SM low cost.
Une fois dans le live pur après le générique – le même que l’anime – , démarrage correct aussi, très inspiré là encore du dessin animé. Un musée d’art, une légion de flics disposés à intervalles réguliers pour monter la garde, l’inspecteur Toshio Utsumi (Quentin dans la VF de l’anime) en train de faire le pied de grue devant un tableau, on est en terrain connu et on se dit qu’à défaut d’apporter du neuf, le film va au moins réussir une adaptation qui tient debout.
Perdu.
L’illusion vole en éclats au bout de quelques minutes quand les Cat’s Eyes montent dans leur Catmobile, une improbable tire minuscule surmontée d’une tête de chat, qu’on dirait conçue par le Joker ou un enfant de quatre ans. Encore un emprunt à l’univers gothamien et pas le dernier, puisqu’elles ont aussi une Catcave et une Catgolfière… S’ensuit une poursuite mal filmée, alternant des plans larges avec des voitures qui zigzaguent sans raison et des plans serrés sur des conducteurs qui agitent le volant dans tous les sens alors que leur véhicule n’est manifestement qu’un décor à l’arrêt.
La suite sera du même tonneau que cette poursuite ratée : couleurs ternes, réalisation ratée, jeu atroce, effets spéciaux en mousse, action sous tranquillisants, rythme mollasson…
Faudra attendre d’être au quart du film pour voir enfin apparaître la méchante de l’histoire, une frappadingue à la tête d’une triade, qui se prend pour l’impératrice de Chine et joue comme une savate, accompagnée d’un sbire qui semble sorti de Ken le Survivant (ou cloné de Bane).
L’ensemble du casting est plus ou moins à la ramasse, sans qu’on sache trop si le problème vient de la direction d’acteurs, des interprètes ou du fait qu’on leur a filé de la merde à jouer, l’intrigue étant inconsistante.
Certains choix esthétiques laissent au mieux perplexe, à commencer par les sisters Kisugi, victimes d’un département costumes en roue libre. La combinaison des tenues en latex et des perruques de l’espace, c’est quand même quelque chose !
L’ensemble est donc bien foireux en soi, et mis à part ses premières minutes raccord avec le matériau original, pas une franche réussite non plus en tant qu’adaptation. Beaucoup de libertés ont été prises avec le manga et l’anime, ce qui aurait pu se justifier pour moderniser une œuvre vieille de plus de quinze ans, renouveler la licence, apporter quelque chose qui soit propre au support cinématographique et au format live, mais non, les changements ont été opérés pour de mauvaises raisons, la principale étant d’avoir voulu jouer à Batman le Défi et d’avoir confondu Cat’s Eye et Catwoman (qui ont certes des points communs, mais là c’est too much, au point de puer le plagiat). Le ton léger qui était une des marques de fabrique du titre a disparu pour essayer de s’orienter vers une ambiance plus sombre et sérieuse, vaine tentative aussi pour un résultat pire que mieux, la faute à des méchants nanars de carnaval.
À voir pour la curiosité si on est un inconditionnel des Cat’s Eye, mais sans espérer retrouver grand-chose de la qualité du manga et de l’anime. Un beau ratage…